réponse de Jean Monneret
à Gilbert Meynier
les massacres du 5 juillet à Oran
La thèse de Gilbert Meynier sur l'origine des massacres du 5 juillet à Oran est surprenante. Il ne fait en réalité que reprendre ce qu'avait déjà avancé à ce sujet un journaliste du Figaro aujourd'hui disparu,il y a trois décennies. Pour ma part, je n'ai jamais cru à la culpabilité de tireurs de l'OAS dans cette affaire. Je n'ai jamais cru non plus à un complot de l'Armée des frontières et des benbellistes qui aurait résulté en un massacre des Européens.
Un historien se penche sur des faits établis. C'est fort loin d'être le cas ici. Meynier admet qu'il n'a aucun document en l'espèce. Pourquoi nous resservir alors la vieille thèse complotarde fumeuse du tandem Ben Bella-Boumedienne montant une provocation pour assurer ensuite son emprise sur Oran.
J'ai réfuté cette "analyse" dans mon livre. Le professeur Meynier l'a-t-il seulement lu? Il confond en outre la fusillade du 26 mars à Alger et le massacre du 5 juillet à Oran. Mauvais début. Il place en outre la rue d'Isly à Oran. Passons. La thèse de la provocation repose sur deux postulats arbitraires : le premier que le FLN d'Oran était favorable au GPRA et hostile à Ben Bella et à Boumedienne ; rien ne le démontre sérieusement. Le second que l'ALN dite "des frontières" avait besoin d'un prétexte pour entrer à Oran. Tout cela ne repose sur rien en l'état actuel de nos connaissances. Quant à évoquer des témoignages........... anonymes de surcroît !
Ce que nous savons et qui est irréfutable est qu'il régnait un climat d'hystérie dans les quartiers musulmans d'Oran. Que le FLN local était peu et mal organisé et que le "militantisme" de certains se confondait avec un certain gangstérisme (voir pages 48 à 52 de mon livre), que l'ALN locale et les ATO était un ramassis de gens mal formés et incontrôlés, que de nombreux manifestants sont venus en centre-ville armés et que dans une telle situation, il ne pouvait qu'y avoir du sang.
De toutes les responsabilités, la plus lourde fut celle du commandement militaire français et de son chef le général Katz qui appliquant aveuglément des directives de Paris qu'il jugeait pourtant absurdes n'avait rien prévu pour ce jour là. Il donna à deux reprises aux troupes françaises l'ordre de rester consignées dans leurs casernes. Ceci, je l'ai prouvé, documents à l'appui, dans mon livre La phase finale de la guerre d'Algérie. Selon Alain Peyrefitte, le général De Gaulle avait dit : "Si les gens s'entre massacrent ce sera l'affaire des nouvelles autorités, pas la nôtre". Les responsabilités sont là et les chercher ailleurs c'est exonérer les dirigeants français de leurs lourdes fautes.
Jean Monneret
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