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études-coloniales
30 septembre 2006

La France n'a pas de dette envers ses ex-colonies, mais une histoire commune (Daniel Lefeuvre)

Constantine_Caom
affiche, vers 1930 (Caom, Aix)

 

«La France n'a pas de dette

envers ses ex-colonies, mais une

histoire commune»

Daniel LEFEUVRE

 

Daniel_30_septembreProfesseur d'histoire économique et sociale à l'université Paris VIII, spécialiste de l'Algérie coloniale, Daniel Lefeuvre publie un essai au titre choc : Pour en finir avec la repentance coloniale *.

 

Le Figaro Magazine - Pourquoi cette vague de repentance à propos de l'histoire coloniale de la France ?
Daniel Lefeuvre - Amplifié à l'extrême ces cinq ou six dernières années, le phénomène tient moins à des questions historiques qu'à des problèmes politiques. Il est lié aux difficultés rencontrées par certains jeunes des banlieues à se faire une place dans la société. Il est lié aussi au malaise qu'ont ressenti des intellectuels français engagés dans le soutien au tiers-monde quand ils ont dû constater l'échec politique, économique, social et même culturel des nations anciennement colonisées. L'exemple de l'Algérie montre qu'une référence pervertie à l'héritage colonial permet aux dirigeants algériens de s'exonérer à bon compte de leurs responsabilités. En accusant la colonisation de tous les péchés du monde, on reporte sur le passé les difficultés du présent. En France, où les politiques d'intégration et de lutte contre le racisme montrent des limites, la stigmatisation du passé colonial est un exutoire facile, mais largement abusif.

Historiquement parlant, le projet colonial fut d'abord un projet républicain, avec un fort ancrage à gauche. Pourquoi l'avoir oublié ?
Parce que la gauche républicaine est passée d'un colonialisme pensé comme «devoir de civilisation» à un anticolonialisme imposé par le monde d'après 1945, sans examen de conscience des injustices que colportait le premier ni des naïvetés qui accompagnaient le second. Au XIXe siècle, si Jules Ferry est le praticien de la colonisation, Léon Gambetta en est le théoricien. Ces deux hommes, en effet, se situent à gauche de l'échiquier politique. A cette époque, le projet impérial n'est pas très populaire. Il est dénoncé par une partie de la droite. Les plus critiques sont les nationalistes, qui estiment que le projet colonial détourne les Français de la revanche sur l'Allemagne, et les économistes libéraux dont la pensée se retrouvera, soixante-dix ans plus tard, chez Raymond Aron. Les radicaux ne se rallient à la politique coloniale qu'à l'extrême fin du siècle, alors que les socialistes glissent du rejet du colonialisme à une politique debanania réformisme colonial.

Le basculement s'opère avec la Grande Guerre. La France fait appel à des soldats coloniaux qui constituent une force d'appoint certes secondaire, mais dont la valeur symbolique est très forte. Au lendemain de la guerre, les troupes coloniales, avec la Légion, sont les plus applaudies lors des défilés du 14 Juillet : une histoire d'amour s'est ouverte entre les Français et les coloniaux. La publicité de l'époque le sent bien, puisque la thématique coloniale y est très présente. Prenons l'exemple de Banania. Au départ, les boîtes s'ornent de l'effigie d'une Antillaise. En 1915, la marque lui préfère celle du célèbre tirailleur sénégalais. Pourquoi ? Parce que pour vendre du chocolat pour les enfants, il faut une image qui soit sympathique et rassurante. On peut juger aujourd'hui que l'effigie du tirailleur est paternaliste, qu'elle ne correspond pas à nos critères moraux, mais c'est un anachronisme que de la définir uniquement comme l'expression même du racisme. Jamais une marque allemande, au même moment, n'aurait affiché un Noir.

Messali Hadj, le père fondateur du nationalisme algérien, témoigne dans ses Mémoires de l'accueil chaleureux et de la considération dont les travailleurs algériens ont été l'objet dans la France des années 20. Cette page d'amour se prolonge jusqu'aux années 50. Un nouveau basculement a lieu avec la guerre d'Algérie, opérant de fait une rupture entre Français et Algériens. Mais le problème ne se pose pas de la même façon pour la Tunisie ou pour le Maroc, ou pour l'Afrique noire, où les indépendances ont été moins conflictuelles.

La France a-t-elle une dette envers les pays qui furent jadis ses colonies ?
La notion de dette n'a pas de sens dans ce contexte. On ne parle pas de dette de la France envers les Etats-Unis à propos du plan Marshall : or la France a donné à ses territoires coloniaux trois fois et demie Ben_Barkaplus que le montant du plan Marshall. Au moment de l'indépendance du Maroc, le dirigeant nationaliste Ben Barka affirme que le pays n'est pas en voie de développement, mais qu'il est «sur la voie du développement». Et tous ses amis du tiers-monde s'extasient devant lui sur le niveau d'infrastructure légué par la France.
Il n'y a pas de dette, mais une histoire commune. La colonisation a permis l'entrée dans les relations économiques mondiales des Etats qui ont été colonisés. La colonisation est un moment de la mondialisationcouv_Daniel_new du XIXe siècle, et le mode d'intégration de ces territoires à cette économie mondialisée. On dira que ce développement a été lacunaire, inégal, injuste. C'est vrai, mais il en a été de même en Occident : toute la France n'a pas basculé en même temps dans la modernité. La colonisation fut donc un moment de la mondialisation. Est-ce bien, est-ce mal, ce n'est pas le problème de l'historien.

 

* Flammarion, 230 p., 18 euros.

entretien réalisé par Sylvie Pierre-Brossolette,
Jean Sévillia et Jean-Louis Tremblais.
Le Figaro Magazine, 29 septembre 2006

 

Transaharienne
affiche, vers 1935 (Caom, Aix)

 

La colonisation a permis l'entrée

dans les relations économiques mondiales des États

qui ont été colonisés



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27 septembre 2006

Colonisation : pour en finir avec les idées reçues (Daniel Lefeuvre)

couv_Daniel_new

 

Colonisation :

pour en finir avec les idées reçues

Daniel LEFEUVRE

 

Dans un essai érudit et nerveux, Pour en finir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre, professeur d’Histoire à l’université Paris-8, s’adresse aux «Repentants» et à leurs discours qui, de l’esclavagisme à la colonisation en passant par l’immigration, dressent un réquisitoire féroce contre une France coupable de tous les maux. Entretien.

Comment en est-on arrivé à considérer la colonisation accomplie par la France comme la genèse du nazisme et Hitler comme le fils spirituel de Gambetta ou Ferry ?
Le moment où un parallèle est fait entre le nazisme et la colonisation se situe lors du procès Papon. Ce dernier fut, comme on le sait, un fonctionnaire zélé de Vichy et joua un rôle important dans la déportation des juifs de Bordeaux. Plus tard, il fut préfet à Constantine et ensuite préfet de police à Paris où il mit en place des instruments de répression violents contre le FLN en France et plus largement contre la population algérienne, notamment lors de la manifestation du 17 octobre 1961 puis celle du métro Charonne. Durant son procès, on fit donc le rapprochement entre colonisation et collaboration. Par ailleurs, il y eut un travail militant sur la notion de massacres de masse et de massacres coloniaux. On développa l’idée qu’il y avait eu des massacres semblables à celui d’Oradour pendant la colonisation. On peut citer les articles de Claude Bourdet ou de François Mauriac évoquant «notre gestapo» en Algérie. Cette littérature militante, parfaitement honorable par ailleurs, a été réanimée pendant le procès Papon où l’histoire coloniale fut présentée comme un «nouveau passé qui ne passe pas» en référence à Vichy.

Ce discours actuel sur la repentance émane de groupes marginaux et militants, mais a aussi été repris dans des cercles plus institutionnels. Vous citez Le Monde et sa fixation sur la guerre d’Algérie, on pense aussi à Libération…
On peut constater ce glissement. Il y a une espèce de discours bien-pensant qui autorise que l’on dise n’importe quoi sur la colonisation en lui attribuant tous les maux possibles : idéologiques, politiques ou économiques avec le sous-développement des anciens colonisés.

Ce discours repentant n’est-il pas le prolongement d’une certaine tendance à l’autoflagellation ou à l’autodénigrement qui va de L’Idéologie française de BHL à «la France moisie» de Philippe Sollers ?
Il s’inscrit effectivement dans ce courant intellectuel qui nous dit que nous devons avoir honte de ce que nous sommes, honte de ce qu’est la France et honte de notre passé.

Daniel_photo_new

 

Parmi les idées reçues que vous dénoncez et démontez, il y a celle selon laquelle la France aurait «conduit un véritable pillage aux colonies dont le sous-développement est une séquelle scandaleuse».
Que la colonisation ait été entreprise notamment pour des raisons économiques, c’est évident. Mais ce n’est pas parce que l’on espère tirer profit de la colonisation que l’on va en tirer profit. Pour certains milieux, qu’il s’agisse d’entreprises ou d’hommes, la colonisation a pu être une «bonne affaire». Ensuite, le budget de l’État s’est-il engraissé grâce aux colonies qui auraient été la vache à lait de l’économie française ? Si l’on observe les principales matières premières dont la France avait besoin, on se rend compte que l’apport des colonies joue un rôle tout à fait marginal. L’exemple le plus frappant est celui du coton, mais le cas du pétrole algérien est assez éloquent et n’a jamais été une manne. Par ailleurs, certaines entreprises ou secteurs d’activités ont trouvé dans les colonies des débouchés importants, plus stables que l’étranger et plus rémunérateurs. Cependant, si cet aspect compte, les colonies n’ont jamais fourni plus de 10 ou 20 % des débouchés extérieurs de la France tandis qu’elles ont été considérablement subventionnés par le Trésor, c’est-à-dire par le contribuable, pour absorber ces richesses. La France a dépensé en net dans son empire trois fois et demi plus que ce que l’aide américaine a apporté à la France du lendemain de la seconde guerre mondiale à la fin du plan Marshall.

Vous rappelez que l’argument économique selon lequel les colonies coûtaient plus cher que ce qu’elles rapportaient était brandi par certains anticolonialistes libéraux ou de droite, comme Raymond Cartier dans Paris Match dont l’expression «La Corrèze avant le Zambèze» est restée fameuse… 
Effectivement, tout un courant d’économistes libéraux, dès le début de la conquête coloniale, remarque que celle-ci, faite en partie au nom de réalités économiques, est une illusion. Pour eux, la prospérité européenne ne peut pas reposer sur la domination coloniale. Cette tradition est étouffée de la première guerre mondiale jusqu’au début des années cinquante, mais retrouve une audience avec Cartier sur un mode indiscutablement raciste et surtout avec Raymond Aron sur un mode plus savant et plus intelligent.

Chez les repentants, vous déplorez l’idée que la torture et les massacres de masse seraient nés chez les Français avec la colonisation. Vous rappelez d’autres épisodes historiques tragiques comme la Vendée…   Évidemment, il y a eu des massacres de masse pendant la conquête coloniale et en particulier pendant la conquête de l’Algérie qui fut longue et dure. En revanche, il n’y a pas eu de spécificité dans la guerre coloniale qui aurait institué, selon certains, des massacres de populations civiles. Ainsi, avant la conquête de l’Algérie, il y a eu des guerres où l’on a usé de ces procédés. C’est vrai pour la guerre en Vendée comme pour la guerre d’occupation française menée en Espagne. D’ailleurs, la plupart des chefs militaires qui ont conquis l’Algérie sont passés soit par la Vendée soit par l’Espagne, comme Bugeaud. Rien de nouveau donc en Algérie. On retrouve aussi les mêmes méthodes en Europe avant le premier conflit mondial avec les terribles guerres balkaniques.


À propos de l’immigration algérienne de l’après-guerre, il y a l’idée reçue selon laquelle le capitalisme français l’aurait provoquée. Or, elle répondait à une volonté politique, et non économique, qui se situait dans la perspective de garder l’Algérie française.
L’immigration algérienne de travail correspond à une nécessité économique lors de la première guerre mondiale. Ensuite, cette immigration répond essentiellement à un facteur : l’accroissement démographique en Algérie allié à la stagnation du nombre d’emplois. Pour ces populations, l’immigration apparaît comme une solution de subsistance. Pour l’État français, la misère en Algérie peut nourrir des sentiments nationalistes contestant la présence française. L’immigration est alors une solution immédiate qui permet de soulager la misère et de réduire les risques politiques. Donc, la France facilite l’accès des Algériens au monde du travail en métropole en mettant en place des mécanismes de préférence nationale. Le patronat n’a jamais été enthousiaste quant à la main-d’œuvre algérienne. Après l’indépendance, ce sont les autorités algériennes qui vont négocier pour que la porte reste ouverte à leurs ressortissants confrontés au chômage.

Autre idée reçue : la main-d’œuvre coloniale aurait reconstruit la France. Vous écrivez que son rôle dans le relèvement national est marginal…  
couv_Daniel_newTout simplement parce que cette main-d’œuvre est très peu nombreuse. Au début des années cinquante, il y a environ 250 000 Algériens en France, 50 000 Marocains et quelques milliers d’autres travailleurs, soit 300 000 personnes pour une population active de 17 ou 18 millions de personnes. Même dans les secteurs où elle est concentrée, elle ne représente que 2 ou 3 % de la population active du secteur.

 

Vous terminez votre livre en exprimant la crainte de voir s’ériger une France du communautarisme et de l’Apartheid. Cependant, ce chemin semble bien engagé… 
Cette idée de repentance conduit à nourrir toute une série de revendications, notamment sur une «fracture coloniale» qu’il faudrait résorber. Il y aurait d’un côté les Français de souche et ceux issus des anciennes colonies. Ces revendications politiques s’appuient sur le principe de la discrimination positive qui définit des droits particuliers en fonction de la communauté à laquelle on appartient. Cela est très grave car ce principe détricote la nation française telle qu’elle s’est construite depuis un gros millénaire. C’est grave aussi pour ces populations qui sont surreprésentées dans les milieux populaires, chez les petits employés et chez les chômeurs. Or, les traiter différemment sous prétexte de répondre à ces problèmes risque de les ghettoïser. Ce type de système fait émerger quelques représentants des communautés dans les élites – on le voit bien aux Etats-Unis – mais la masse de ces gens est reléguée aux marges de la société. Si l’on se lance dans un modèle communautariste, on écarterait ces populations de l’ascenseur social et du creuset républicain français qui, à mon avis, continue de fonctionner malgré ses imperfections.

Propos recueillis par Christian Authier
photo : © D. Pruvot / Ed. Flammarion

 

Pour en finir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre
Flammarion, 230 p, 18 euros.

- article paru dans l'édition du vendredi 22 Septembre 2006
de l'Opinion indépendante (Haute-Garonne)

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* Éric Conan, dans l'Express (21 septembre 2006) :
"Faut-il avoir honte d'être français ?"




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26 septembre 2006

Ne cédons pas à l'intimidation (commentaire des Échos)

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le commentaire du journal Les Échos
(mardi 26 septembre 2006)

 

Ne cédons pas à l'intimidation

 

Non, la conquête coloniale n'est pas la répétition générale du nazisme ! Non, il n'y a eu ni volonté génocidaire ni pillage systématique des colonies ! Non, les travailleurs immigrés n'ont pas été appelés par un patronat français suceur de sang ! Non, les Nord-Africains n'ont pas reconstruit à eux seuls la France !

Quel plaisir de tomber sur un livre décapant, argumenté, offensif, qui ne s'en laisse pas compter par les ci-devant «Indigènes de la République», jeunes Français le plus souvent, dont les parents sont originaires des ex-colonies et qui exigent que les Français de métropole expient pour leur passé colonial. «Pour en finir avec la repentance coloniale», de Daniel Lefeuvre, appartient à cette catégorie de livres à rebrousse-poil de la bien-pensance. Mais ce n'est pas un pamphlet gratuit, c'est un livre d'historien, argumenté, bourré de chiffres, qui s'appuie sur des sources (archives, thèses...).

 Pour en finir... démonte les mensonges colportés par les «idiots utiles» des «Indigènes de la République», Olivier Le Cour Grandmaison ou Gilles Manceron entre autres, qui n'ont de cesse de faire des colons les précurseurs des nazis, de Jules Ferry le père spirituel de Goebbels, des «enfumades» des «pré-Oradour», des colonnes mobiles de Bugeaud la matrice de la division Das Reich... Les «Indigènes» - Daniel Lefeuvre préfère les appeler, eux et leurs compagnons de route, les «Repentants» - n'ont qu'un but : «prouver» que le colonialisme est un hitlérisme avant l'heure et que la France est consubstantiellement un pays raciste à l'origine de leurs «malheurs». Daniel Lefeuvre a écrit ce livre courageux et d'utilité publique par souci de la vérité. Et civisme, pourrait-on dire. Car il redoute de voir une partie des Français, «bien persuadés qu'ils seront à jamais les indigènes d'une République irrémédiablement marquée du sceau de l'infamie coloniale», rejeter nos institutions et son principe phare, l'égalité en droit des individus. Au bout de ce travail de sape, se dessine une France des «communautés», avec leurs règles et leurs droits propres. Une «France de l'Apartheid», selon Daniel Lefeuvre. À moins que ce ne soit une France de guerre civile.

Emmanuel HECHT

Pour en finir avec la repentance coloniale,
de Daniel Lefeuvre, Flammarion, 30 pages, 18 euros.

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26 septembre 2006

Religions et espaces coloniaux (Dominique Borne et Benoit Falaize)

http://peres-blancs.cef.fr/image2/fontainenoviciat.jpg
groupe des novices Pères Blancs en 1885 (source)



Religion et espaces coloniaux :

quel enseignement ?

IESR - EPHE
Institut Européen en Sciences des Religions
École Pratique des Hautes Études - Sorbonne

                            

Religion et espaces coloniaux : quel enseignement ?
Séminaire (2006-2007) animé par Dominique Borne et Benoit Falaize
à l’Institut Européen en Sciences des Religions et à l’INRP

Ce séminaire de recherche vise à explorer une question encore mal connue et peu abordée, celle des liens complexes qu’entretiennent entre eux la religion et le monde colonial. Le séminaire tentera de renouveler la façon d’enseigner le processus de colonisation /décolonisation. Ce séminaire dédoublé se tiendra à Paris (IESR) et à Lyon (INRP). Des spécialistes des questions traitées interviendront lors de chaque séance. Ce séminaire est ouvert à tous.

Cath�drale Catholique de Phat Diem
cathédrale de Phat Diem (Vietnam, XIXe siècle)

     dates (en doublons Paris le jeudi 17h-19h /Lyon le lundi 17h-19h) :

- Christianisme et islam en terre coloniale d’Afrique noire : les cas anglais et français, avec Bernard Salvaing (Nantes), jeudi 19 octobre (à l’iesr) et lundi 23 octobre (à l’inrp)

- La gestion coloniale du pluralisme religieux en Asie du sud-est, avec Claire Tran Thi Lien (Lille) et Rémi Madinier (ehess), jeudi 16 novembre (à l’iesr) et lundi 13 novembre (à l’inrp) 

- Religion et colonisation dans l’aire Pacifique, avec Claire Laux (Bordeaux) et Alban Bensa (ehess), le 14 décembre (à l’iesr) et 18 décembre (à l’inrp)

- Missions et colonisation entre connivence et divergence : points de vue catholique et protestant, avec Jean-François Zorn (Montpellier) et Claude Prudhomme (Lyon), le 1 février (à l’iesr) et 5 février (à l’inrp) 

- Religion et colonisation au Proche-Orient, avec Chantal Verdeil (Lyon) et Jean Leca (Paris), le 15 mars (à l’iesr) et 19 mars (à l’inrp).

- Religion et processus de décolonisation, avec Gilbert Meynier (Lyon) pour : nation et islam dans le FLN entre 1954 et 1962, le 26 avril (à l’iesr) et le 23 avril (à l’inrp)

- Bilans, pédagogies, avec Daniel Rivet (Lyon), Dominique Borne (iesr) et Benoit Falaize (inrp), le 31 mai (à l’iesr) et le 4 juin (à l’inrp).

Le nom des intervenants est donné sous réserve.
La participation au séminaire est libre de tout frais d’inscription.

dominique_borne
Dominique Borne et Benoit Falaize

Pour toute information complémentaire, s’adresser à Philippe Gaudin
Responsable formations à l’IESR,
philippe.gaudin@ephe.sorbonne.fr
Tél : 01 40 52 10 03


Ben Badis et Tayeb el-Oqbi, de
l'Association des Oulémas algériens (1931)

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Inscription au séminaire " Religion et modèles coloniaux : quel enseignement ?"

Bulletin à imprimer et à envoyer à l’IESR, 14 rue Ernest Cresson, 75014

Je participerai au séminaire à Paris,  Lyon  (rayer la mention inutile)

Nom :
Prénom :
Adresse :
Tél :
Courriel :
Fonction :

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Cardinal_Lavigerie.jpg (14774 octets)
le cardinal Lavigerie (1825-1892), fondateur de la
société des Pères Bancs et des Soeurs missionnaires d'Afrique




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25 septembre 2006

Les harkis, prisonniers de mémoire (Fatima Besnaci-Lancou et Claude Liauzu)

 

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(source)

25 septembre : journée nationale
d'hommage aux harkis

 

Les harkis, prisonniers de mémoire

Il faut lever l'opprobre qui

pèse sur ces anciens soldats autochtones supplétifs

de l'armée française en Algérie

Fatima BESNACI-LANCOU et Claude LIAUZU

 

Libération - mardi 02 août 2005

À Madagascar, le président Chirac a pris ses distances avec la loi du 23 février 2005, dont l'article 4 impose la reconnaissance dans les programmes scolaires du «rôle positif de la colonisation» ; et avec les commémorations en l'honneur de l'OAS en rappelant «le caractère inacceptable des répressions engendrées par les dérives du système colonial». A sa majorité d'en tirer les conclusions et de revenir sur la faute qu'a été le vote de cet article de loi, qui a suscité en France des protestations grandissantes, bien au-delà du milieu des historiens, et en Algérie des réactions très vives. Il n'est que temps d'abroger cet article. C'est là une condition nécessaire pour fermer «la boîte à chagrin algérienne». Elle n'est pas suffisante, il faut aller plus loin et cela nontimbre_hommage_aux_harkis seulement à Paris mais aussi à Alger. Selon les mots de Chirac, «on doit assumer son histoire, ne pas oublier les événements ni nourrir indéfiniment aigreur et haine».

Des mémoires blessées ne peuvent que cultiver les rancoeurs. La légitimité de l'indépendance de l'Algérie ne doit pas laisser dans l'ombre la douleur des pieds-noirs qui ont perdu une terre, leurs biens, leurs cimetières, ni la détresse des appelés lancés dans une guerre sale, ni le massacre et le bannissement des familles de harkis, poursuivies parfois au-delà de la mort. Ainsi, la dépouille d'un Français, ancien harki, venue de Normandie pour être inhumée dans sa terre natale des Aurès a été refoulée au printemps dernier. Le défunt bénéficiait pourtant aussi de la nationalité algérienne. Harki ! Ce cas n'est pas rare. Qui ignore l'importance symbolique du repos en terre d'islam ? Pourquoi cette humiliation, se demandent ses enfants ? Dans un autre contexte, à l'occasion de la visite à Batna du conseil municipal de Rouen, un des élus, unDESTIN DE HARKI seul, Brahim Sadouni, auteur de Destin de harki (1), considéré comme persona non grata, s'est vu interdire le sol algérien. Harki !

Pourquoi Paris laisse-t-il faire ? Est-ce pour préserver des intérêts économiques et diplomatiques ? Ne serait-ce pas simplement de l'indifférence, quand l'on sait que la première commémoration en l'honneur des anciens harkis remonte au 25 septembre 2001, quarante ans après ! Le cynisme, cette communauté de destin en connaît bien le goût, tellement amer qu'il lui faudrait des générations pour s'en débarrasser.

La «boîte à chagrin algérienne» n'est pas facile à fermer. En France, le silence officiel a laissé le champ libre aux guerres de mémoire. En Algérie, la mémoire officielle est ressentie de plus en plus comme un alibi justifiant le pouvoir des pères du Maghreb, le Maghreb des pères, où les jeunes ne trouvent pas leur place.

Dans ce paysage confus, les surenchères se multiplient. L'association Harkis et droits de l'homme a, dès le 28 février, désapprouvé par un communiqué de presse les articles de la loi du 23 février qui les associent, à leur corps défendant, à la réhabilitation du colonialisme et des anciens membres de l'OAS. La seule décision pouvant leur rendre justice est de reconnaître les responsabilités de la gauche comme de la droite dans cette guerre, dans les pouvoirs spéciaux attribués à l'armée, la responsabilité de l'Etat dans la fin tragique de cent trente-deux ans de domination française.

Il n'est pas d'abus de mémoire ni d'occultation qui résiste à un peu d'histoire. Qui sont donc les harkis ? Le terme vient de l'arabe harka, qui signifie mouvement. Les harkis sont les soldats de certaines unités supplétives autochtones recrutés par l'armée française pendant la guerre d'Algérie. Leur contrat était très précaire, hors du droit civil, d'une durée d'un mois, révocable à tout moment. Cette appellation recouvre une réalité complexe et hétérogène. Il y eut ceux qui étaient des instruments du colonialisme, bien sûr. D'autres, anciens soldats et gradés, ont pu être sensibles à la «fraternité des tranchées», à certaines valeurs de la vie militaire. L'importance des troupes coloniales lors des guerres mondiales et outre-mer est une évidence.

Mais tous les protagonistes n'ont pas eu la possibilité de choisir : la violence française a été accompagnéemelouza d'enrôlements forcés, et la propagande de guerre a tiré parti de l'image de ce «loyalisme». Le FLN, lui aussi, a tout autant usé de la terreur comme moyen de pouvoir sur la société : on citera seulement le massacre des partisans de Messali Hadj, qui a fait 374 morts en mai 1957 dans le village de Melouza [photo ci-contre]. Mouloud Feraoun, assassiné par l'OAS en 1962, écrivait le 8 novembre 1956 dans son Journal 1955-1962 (Seuil) : «Les prétentions des rebelles sont exorbitantes, décevantes, elles comportent des interdits de toutes sortes, des interdits dictés par le fanatisme le plus obtus, le racisme le plus intransigeant, la poigne la plus autoritaire... Défense de faire appel au toubib (?), à la sage-femme (?), au pharmacien (?). Et puis, il faut recevoir selon notre tradition hospitalière nos braves invités qui prennent des allures de héros et d'apôtres tout comme les grands saints de l'islam d'illustre mémoire... Il ne reste aux femmes qu'à youyouter avec entrain en l'honneur de la nouvelle ère de libération qui semble pointer pour elles à l'horizon qui barre inexorablement nos montagnes sombres.»

De plus, les vengeances personnelles, assassinat d'un proche, haines ancestrales, code de l'honneur ont aussi parfois imposé de s'enrôler dans un camp ou dans l'autre. On est loin des grands choix idéologiques tels que les présentent les discours nationalistes. Combien de familles sont traversées par des allégeances opposées ? Combien d'individus ont traversé les camps ? Les harkis ont subi le vae victis, malheur aux vaincus.

Victimes de la haine des vainqueurs, soumis à des supplices épouvantables, privés de toute dignité, traqués, combien sont morts lors de «l'été rouge» ? Ceux qui ont pu parvenir ici, malgré le pouvoir gaulliste, qui arivesaltes_1962_1 tout fait pour les en empêcher, ont été parqués dans des sortes de réserves indiennes, maintenus dans une dépendance coloniale, perçus par une bonne partie de la gauche comme des suppôts du colonialisme et par la France profonde comme des tribus indignes de la citoyenneté à part entière. Cependant, les nouvelles générations ont bénéficié de la scolarisation : une élite s'est constituée, qui, à l'image des enfants issus de l'immigration, a entrepris un travail de mémoire, de réhabilitation de la figure humiliée du père.

Comment ne pas voir que, dans les deux cas, ces paysans souvent pauvres, non scolarisés, ont été victimes des nationalismes français et algérien ? Même origine sociale et ethnique, même ségrégation par la population dominante, même déchirure identitaire ! C'est le sort de tous les êtres et groupes frontières. C'est le sort de ce chrétien venu de l'islam, de ce citoyen français qui se voulait aussi algérien, du grand écrivain Jean Amrouche, mort lui aussi à la veille de l'indépendance, auteur de Un Algérien s'adresse aux Français. «Les hybrides culturels sont des monstres. Je me considère donc comme condamné par l'Histoire. Le Jean Amrouche qui existe aujourd'hui, algérien cent pour cent par le sang ; né de père et de mère kabyles, appartenant à la famille musulmane et cependant élevé dans la religion catholique, avec comme langue principale (bien que le kabyle soit aussi ma langue maternelle) le français, harkis_femmesce Jean Amrouche n'a aucun avenir.»

Mais en 2005, les conditions ne sont plus les mêmes. «La guerre est faite à deux/L'un est mort/Et l'autre aussi», comme le dit Siham Jabbar, écrivaine irakienne. N'est-il pas temps que les vivants comprennent que cette guerre les traverse tous, qu'ils ont tous du fellaga et du harki, de l'immigré ou de l'émigré en eux ? Que des convergences s'affirment à partir de mémoires partagées ? Que les millions de passeurs de rives obtiennent enfin d'être reconnus comme des fruits de cette histoire ?

(1) Editions Cosmopole, 2002.

Fatima BESNACI-LANCOU présidente de l'association
Harkis et droits de l'homme
Claude LIAUZU professeur à Paris-VII

 

 

______________________________________________________________________

 

 

Harkis_150_000_tu_s_SHAT
lettre du général Forret, chef du Service historique de l'Armée de Terre, en 1977,
citant un document (1975) du "Bureau d'aide aux musulmans français"
(Hôtel National des Invalides) qui fait état de 150 000 "supplétifs disparus ou exécutés
par le F.L.N.". Reste à établir la généalogie de ce document et de cette estimation.
(source internet de cette image)
- cliquer pour agrandir

 

harkis_drapeau_et_m_dailles
rassemblement d'anciens harkis en 2006 (source)

 

 

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24 septembre 2006

Les Nord-Africains n'étaient pas de la chair à canon (Daniel Lefeuvre)

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Les Nord-Africains

n'étaient pas de la chair à canon

Daniel LEFEUVRE

 

CINEMA

Le film vu par un historien, Daniel Lefeuvre : «Les Nord-Africains n'étaient pas de la chair à canon»
- Les Échos - 22 septembre 2006

Indigènes est «un bon film où l'on ne s'ennuie pas, et c'est un film utile, car ces combattants, qui ont été l'«épée de la France», selon l'expression de De Gaulle, méritent notre reconnaissance», estime l'historien Daniel Lefeuvre, qui vient de publier Pour en finir avec la repentance coloniale (Flammarion). Le traitement historique du film n'en suscite pas moins quelques questions.

Pourquoi voit-on aussi peu de combattants français ? Sur les cinq personnages principaux, un seul incarne un soldat pied-noir : le sous-officier Martinez (interprété par Bernard Blancan). Par ailleurs, ce sous-officier aurait une mère arabe. Peu plausible. Arabes et Européens n'avaient pas de relations intimes et, à supposer, qu'ils en aient eues, l'enfant n'aurait pas été reconnu par la famille du père. Plus discutable encore : les scènes des durs combats de la vallée du Rhône, qui ont entraîné de lourdes pertes, semblent vouloir accréditer l'idée que les «indigènes» étaient de la chair à canon.

Les statistiques de la mortalité des différentes composantes de l'armée d'Afrique, répertoriées par Daniel Lefeuvre à partir des archives, réfutent cette opinion. Le taux de mortalité des soldats nord-africains, les plus nombreux, est de 5 %, celui des soldats d'Afrique noire d'un peu moins 5 %, celui des Français «de souche», y compris des Corses, qui ont constitué un fort contingent, de 5,70 %, et celui des Français d'Algérie de 8 %. Autre indicateur pertinent, le pourcentage de mobilisés pour une classe d'âge : il est de 45 % pour les pieds-noirs, proche de 9 % pour les colonisés.

En revanche, Daniel Lefeuvre juge tout à fait «positives» certaines scènes : le respect des traditions musulmanes (notamment des sépultures) par l'armée ; l'accueil chaleureux de la population française, à Toulon, à Marseille, en Alsace. Dernier point, incontestable, souligné par le film : la carrière à deux vitesses des soldats. Les «indigènes» avaient des soldes inférieures du tiers, voire de moitié, à celles des Français, et leur progression en grade était plus lente et limitée.

Dès 1943, pourtant, les autorités coloniales avaient demandé l'égalité de traitement. L'administration des Finances s'y est opposée. Les difficultés financières de l'après-guerre, la «cristallisation» (le gel) des pensions en 1959 ont empêché ce geste minimum de reconnaissance pour le sang versé, réclamé un mois avant sa mort par le général Leclerc.

journal Les Échos, 22 septembre 2006




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23 septembre 2006

Les déportés Maghrébins en Nouvelle-Calédonie (Mélica Ouennoughi)

 

 

Les déportés Maghrébins en

Nouvelle-Calédonie

Mélica OUENNOUGHI



- Les déportés maghrébins en Nouvelle-Calédonie et la culture du palmier-dattier (1864 à nos jours), Melica Ouennoughi, L'Harmattan, 2006.

- présentation de l'éditeur : L'auteur analyse la situation des descendants de Maghrébins en Nouvelle-Calédonie dont les ancêtres ont été déportés à la suite des insurrections algériennes et le ralliement d'autres clans tunisiens et marocains. De plus, l'auteur suit également l'histoire de ce lien entre le Maghreb ancien et la Nouvelle-Calédonie, grâce au fil conducteur que constitue l'introduction par les déportés de la culture du palmier dattier. Un éclairage sur la complexité historique de la colonisation française en Algérie puis en Nouvelle-Calédonie.

- note de l'éditeur : L'ouvrage se présente comme un recherche interdisciplinaire et transversale. L'auteur analyse la situation des descendants de Maghrébins en Nouvelle-Calédonie dont les ancêtres ont été déportés à la suite des insurrections algériennes et le ralliement d'autres clans tunisiens et marocains. Durant les années 1860, la France met en place un essai de colonisation pénale qui deviendra le centre pénitentiaire de Bourail.
Cette enquête réalisée sur le terrain et l'ensemble de la mémoire orale exposés sont confrontés avec de nombreuses sources écrites. Notamment des listes généalogiques des déportés, des listes des mariages mixtes qui ont donné quelques milliers d'hommes et de femmes calédoniens formant la descendance aujourd'hui, des listes d'attribution des lots de terre visant à utiliser les déportés en tant que concessionnaires pour la mise en valeur agricole de l'île et aussi avec des sources relatives aux insurrections algériennes elles-mêmes.

L'auteur suit également l'histoire du lien entre le Maghreb ancien et la Nouvelle-Calédonie grâce au fil conducteur de la culture du palmier dattier. La reconstruction identitaire d'une communauté maghrébine dans les pays d'Outre-mer ne pouvait être compréhensible, qu'après avoir reconstitué les étapes anthropologiques de leur histoire sociale, religieuse, économique et botanique. La formation de palmeraies pour souder la communauté ainsi que les effets au niveau de techniques et de l'outillage nous révèlent l'existence d'un héritage almoravide berbère qui prend son origine en Espagne médiévale (XIe siècle), dont l'auteur analyse les modes de diffusion permettant de suivre les mouvements migratoires des groupes humains. La rencontre entre savoir-faire traditionnel et savoir-faire moderne, l'étude des différents types de dattes, ouvrent des perspectives très intéressantes, aussi bien pour les agronomes et historiens professionnels que pour les recherches généalogiques des familles.

Voici la première thèse universitaire qui apporte des éclairages sur la complexité historique en remontant aux origines du processus de la colonisation française en Algérie puis en Nouvelle-Calédonie.

 

Mélica Ouennoughi est docteur en anthropologie historique. Membre-chercheur rattachée au Laboratoire d'Histoire contemporaine de l'Université de Nouméa. Spécialisée sur les migrations maghrébines et sahariennes en Océanie, elle a consacré de nombreuses publications à la question des Calédoniens maghrébins en Nouvelle-Calédonie et leur rôle dans la mixité sociale avec les autres communautés (françaises, européennes, mélanésiennes, indonésiennes, japonaises).

 

 

melica- entretien avec Melica Ouennoughi dans : Bordj Bou Arreridj info (18 mars 2006) : "Lorsque je suis arrivée sur le territoire calédonien, pour retrouver les descendants d’algériens, je demandais l’itinéraire aux Kanaks. La première réponse qu’ils m’ont donné, c’est : lorsque tu vois un dattier, c’est qu’il y a un «Viel arab » qui est passé par là".

 

 

 

 

- un commentaire de Rafik Darragi, paru dans la Presse de Tunisie (9 mars 2006)

- un commentaire de Rachid Sellal sur le site Afrique du Nord north africa (18 avril 2006)

- le site de Mel
ica Ouennoughi

contact : melica.ouennoughi@voila.fr


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Nouvelle-Calédonie : lieu de déportation...

source : Chocolat Télévision

 


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22 septembre 2006

le débat sur la Repentance coloniale est lancé

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le débat sur

la Repentance coloniale

est lancé



Le livre de Daniel Lefeuvre, Pour en finir avec la repentance coloniale est disponible en librairie. En voici la présentation :

Après celle de la guerre d'Algérie, une nouvelle génération d'anticolonialistes s'est levée, qui mène combat couv_Daniel_newpour dénoncer le péché capital que nous devons tous expier : notre passé colonial, à nous Français. Battons notre coulpe, car la liste de nos crimes est longue Nous avons pressuré les colonies pour nourrir notre prospérité, les laissant exsangues à l'heure de leur indépendance ; nous avons fait venir les "indigènes" au lendemain des deux guerres mondiales pour reconstruire la France, quitte à les sommer de s'en aller quand nous n'avions plus besoin d'eux ; surtout, nous avons bâti cet empire colonial dans le sang et les larmes, puisque lacouv_Daniel_new colonisation a été rien moins qu'une entreprise de génocide : Jules Ferry, c'était, déjà, Hitler ! Contrevérités, billevesées, bricolage... voilà en quoi consiste le réquisitoire des Repentants, que l'auteur de ce livre, spécialiste de l'Algérie coloniale et professeur d'histoire à l'université Paris-8, a entrepris de démonter, à l'aide des bons vieux outils de l'historien - les sources, les chiffres, le contexte. Pas pour se faire le chantre de la colonisation, mais pour en finir avec la repentance, avant qu'elle ne transforme notre Histoire en un album bien commode à feuilleter, où s'affrontent les gentils et les méchants.

 

 


Ils vous donnent du pain. Donnez leur de quoi se vêtir (...) 28 mai 1942
journée nationale nord-africaine de collecte des textiles
(...). Affiche en couleurs illustrée,
ministère de l'Information, 1942
(source)

 

 

Sur le site herodote.net, André Larané livre son sentiment à la lecture de l'ouvrage : "Voilà plusieurs mois que monte en France un débat autour du passé colonial avec une question très actuelle : les jeunes Français issus des anciennes colonies (Antilles, Afrique du nord, Afrique noire) doivent-ils se considérer comme des victimes de ce passé ? (...)  La repentance ne risque-t-elle pas en définitive de réussir là où les colonistes et les racistes d'antan ont échoué, en enfermant dans un statut de victimes les Français originaires des Antilles, d'Afrique du Nord ou d'Afrique noire et en les convainquant qu'il leur est impossible d'en sortir par leur effort personnel ?". Cet article est repris sur le blog de Orlando de Rudder et sur celui de Guadeloupe attitude.

Le 19 septembre, le site de la Ligue des Droits de l'homme de Toulon, indique qu'il ne "s'adonne pas à la repentance coloniale" : "les adhérents de la section LDH de Toulon ne s’adonnent pas à la repentance. Nous ne sommes ni des pénitents, ni des flagellants, et nous ne nous recouvrons pas la tête - ni celle des autres - de cendre. Le contexte local - c’est dans le midi méditerranéen que sont venus s’installer beaucoup des rapatriés d’Afrique du Nord, et Toulon a été la plus importante des villes gagnées par l’extrême-droite - nous a amenés à développer notre réflexion sur notre passé colonial et notamment en Algérie. Mais il n’a jamais été question pour nous d’envisager des excuses ou de demander pardon pour des faits - dont nous ne portons d’ailleurs aucune responsabilité individuelle. Nous n’avons pas davantage cherché à juger les hommes."

 

 

 

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Daniel Lefeuvre, professeur d'Histoire
à l'université Paris VIII-Saint-Denis

 

 

 

- démonter le réquisitoire des Repentants, à l'aide des bons vieux outils de l'historien - les sources, les chiffres, le contexte. Pas pour se faire le chantre de la colonisation, mais pour en finir avec la repentance, avant qu'elle ne transforme notre Histoire en un album bien commode à feuilleter, où s'affrontent les gentils et les méchants.

Pour en finir avec la repentance coloniale, Daniel Lefeuvre
Flammarion, 230 p, 18 euros.

 

 

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21 septembre 2006

Le vrai visage des tirailleurs (interview Daniel Lefeuvre)

embarquement_marocains_1943http://www.military-photos.com/DETTA.jpg
Embarquement de tirailleurs et spahis marocains à Oran en 1943
(source)

 

Le vrai visage des tirailleurs

 

La vérité sur le sacrifice des troupes indigènes selon Daniel Lefeuvre, auteur de Pour en finir avec la repentance coloniale (Flammarion)

L'Express du 21/09/2006
Propos recueillis par Christian Makarian

 

Daniel_Lefeuvre- À partir de quand trouve-t-on des troupes coloniales sous le drapeau français ?
- Daniel Lefeuvre: Dès la guerre franco-allemande de 1870. Antérieurement, il ne faut pas oublier le rôle des Algériens, les Zwava (ce qui a donné le mot zouave), recrutés par l'armée pour participer à la conquête de l'Algérie, dès l'été 1830. Mais c'est avec la guerre de 1914 que l'appel aux colonies a été le plus massif. Plus de 600 000 soldats coloniaux sont mobilisés. Il faut préciser que le service militaire obligatoire est étendu, en 1912, aux jeunes Algériens musulmans sans pour autant qu'ils obtiennent la citoyenneté.

- La France saura-t-elle remercier ces hommes après 1918 ?
Daniel Lefeuvre : Des réformes partielles sont introduites en 1919, mais il n'y a pas d'extension à tous d'une pleine et entière citoyenneté. Il y a des améliorations matérielles, des droits accordés, des pensions, des privilèges d'emploi pour les mutilés ou les veuves de guerre. Des reconnaissances symboliques sont également accordées. L'armée a toujours été très scrupuleuse sur le respect des rites religieux, que ce soit en termes de nourriture ou de sépulture. Une mosquée en bois itinérante a même été construite. C'est au grand peintre Etienne Dinet que l'armée demande de dessiner les tombes des soldats musulmans tués au combat. Après la guerre, on inaugure la Grande Mosquée de Paris. L'Etat français finance l'acquisition d'une hôtellerie à La Mecque, pour accueillir les pèlerins venant des colonies françaises.

- Faut-il parler d'une «saignée coloniale» ?
Daniel Lefeuvre : Les statistiques ne montrent pas de surmortalité des troupes coloniales, l'horreur étant partagée par tous les combattants. Au sens de l'assimilation, même si c'est une assimilation par la guerre, la France montre une sacrée confiance dans ses troupes coloniales pour en arriver à les mobiliser massivement, à les armer, à les instruire, sachant qu'ensuite c'étaient des soldats aguerris que l'on allait renvoyer chez eux et non des paysans désarmés. Et, dernière marque de reconnaissance, les troupes coloniales sont les plus applaudies, avec la Légion, lors des défilés militaires de l'après-guerre de 1914. Elles sont ovationnées. Un signe de cette popularité vient de ce qu'une grande marque de petits déjeuners pour enfants change son image - c'était une Antillaise avec des bananes - pour adopter un tirailleur sénégalais. Aujourd'hui, on voit dans Banania un stéréotype raciste ; dans l'esprit de l'époque, c'était l'inverse. On n'aurait pas vendu un petit déjeuner pour enfants avec une image répulsive.

- Comment évaluer le sacrifice des troupes «indigènes» entre 1942 et 1945 ?
Daniel Lefeuvre : Il faut rappeler qu'il y a 176 000 Français, Européens d'Afrique du Nord, engagés sous les armes ; ce qui représente environ 45% d'une classe d'âge mobilisée. C'est énorme ! Puis on compte 253 000 soldats pour toute l'Afrique du Nord et l'Afrique noire réunies. Ces derniers forment une armée de fantassins. Mais il y a des lieutenants et des capitaines musulmans. Avant la guerre, on remarquait déjà un colonel algérien musulman, polytechnicien.

- Quel est l'état réel de leurs pertes ?
- Daniel Lefeuvre : Parmi les 253 000 soldats nord-africains, au moment de la capitulation, on compte un peu moins de 12 000 tués et de 40 000 blessés. Soit un taux de mortalité de 5%. Pour les 100 000 soldats d'Afrique noire, 4 500 tués, c'est-à-dire un taux de mortalité de 5%. Au sein des troupes françaises d'origine européenne, il y a 40 000 tués, soit un peu moins de 6% de pertes. Enfin, parmi les 176 000 pieds-noirs, on dénombre 14 000 tués, ce qui équivaut à un taux record de 8%.

 

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tirailleurs sénégalais sur une plage de Fréjus (1914-1918) (source)

 

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19 septembre 2006

Histoire économique du temps colonial

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Histoire économique du temps colonial

résumé

 

Les colonies ont-elles été une bonne affaire pour la France ? Jacques Marseille le pensait JMquand il entreprit de dresser le bilan de la colonisation. Il lui aura fallu établir les comptes de 469 sociétés coloniales, examiner les chiffres du commerce extérieur de la France de 1880 à 1960, dépouiller les archives ministérielles et les papiers privés de Paul Reynaud, Marius Moutet et de l'ancienne Union coloniale pour comprendre, au contraire, à quel point l'empire a constitué un boulet entravant la modernisation du capitalisme français.
C'est l'histoire d'un divorce que cet ouvrage retrace. Divorce entre une opinion progressivement gagnée à la conscience impériale, par les fastes de l'Exposition de 1931, la virile propagande des films campant les héros du bled, la géographie coloniale des manuels scolaires, et un mouvement rassemblant la fraction la plus moderne du patronat et des responsables publics pour lesquels, comme le dira de Gaulle, "la décolonisation est notre intérêt, donc notre politique".

 

commentaire

Soyons équitables

Soyons clairs : il ne s'agit pas aujourd'hui de justifier d'une quelconque manière le colonialisme, c'est-à-dire l'occupation d'un pays par un autre,  sous prétexte que le pays colonisateur a le droit, en raison-de-sa-puissance-militaire, économique, religieuse ou intellectuelle, de créer un empire qui assimile des peuples considérés comme inférieurs. L'histoire de la colonisation est aussi vieille que celle des civilisations, puisque dès le IIIe millénaire, des Mésopotamiens s'installaient loin de leurs villes natales, et il n'est aucun grand pays par le passé qui n'ait établi des comptoirs ou géré des territoires fort éloignés de ses centres vitaux. Le mouvement colonisateur qui s'amplifie au XIXe siècle et au début du XXe siècle s'inscrit donc dans une logique que le progrès technique accélère. Un excellent livre de Jacques Marseille qui vient d'être réédité (il parut en 1984) développe des analyses qui présentent le colonialisme d'une nouvelle manière, se plaçant d'abord sur le plan de l'économie et de l'histoire, non sur celui de la politique ou de la philosophie.

Alors que l'on croit encore que le colonialisme a toujours été le fer de lance du capitalisme, Jacques Marseille montre que ce ne fut le cas que jusqu'en 1930, moment où le divorce éclata. Chiffres à l'appui - comptes de 469 sociétés, bilans du commerce extérieur, archives ministérielles... difficilement réfutables -, il conclut que, loin d'avoir favorisé le capitalisme français, les colonies l'ont sérieusement handicapé et que la décolonisation "n'avait causé aucun dommage au capitalisme français, qu'apparemment même, elle avait été l'une des conditions et l'accompagnement logique de sa modernisation". Il détruit aussi un autre cliché né dans la seconde moitié du XXe siècle autour du clivage entre la droite et la gauche, démontrant, citations et sondages à l'appui, que les partisans de la colonisation - en 1949, 81 % des Français - se trouvaient au moins autant à gauche qu'à droite En 1925. Léon Blum ne déclarait-il pas : "Nous admettons le droit et même le devoir des races supérieures d'attirer à elles celles qui ne sont pas parvenues au même degré de culture et de les appeler aux progrès" ? En 1944, le député communiste Mercier affirmait encore qu'il fallait "souder" la métropole et l'ensemble des colonies. Jusqu'à la Seconde Guerre mondiale, au moins, un large consensus réunissait donc les Français autour de "leurs" colonies.

Il sera toujours impossible de dresser un bilan moral : comment y intégrer, par exempte, la mort des quelque 75 000 "coloniaux" lors de la Grande Guerre ? Le progrès, dans ce qu'il a de meilleur - médecine, droits de l'homme, de la femme, de l'enfant, allongement de la durée de vie justifie-t-il la disparition des sociétés traditionnelles, d'autant que le meilleur est indissociablement lié au pire ? Comment juger d'autre part le rôle des missions ? Les bénéfices - et les pertes - liés aux colonies ne sont donc pas aussi clairement répartis que ce qu'on a voulu le dire. Car, remarque enfin l'auteur "en longue durée, les pays riches ont toujours été de meilleures "affaires" pour les pays riches que les pays pauvres".

Jacques Marseille, Empire colonial et capitalisme français. Histoire d'un divorce, Albin Michel. 644 pages.

Notre Histoire, 1er avril 2005



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