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études-coloniales
30 janvier 2008

bagne de Poulo Condor / Con Son (Jean-Michel Rocard)

Diapositive1

 

un rappel historique sur Poulo-Condor

Jean-Michel ROCARD

 

La France a du mal à reconnaître les erreurs du passé : c’est le cas de celle, monumentale, du bagne de Poulo-Condor construit dans les années 1880 à l’image de celui de Cayenne (Guyane). Et les Américains, dans les années 1960, et les Vietnamiens de l’Oncle Ho eux-mêmes après leur indépendance ont utilisé ce même bagne, il faut le dire. En effet, les premiers ont été à l’origine d’une extension des camps d’internement qui étaient déjà nombreux sur l’îlot montagneux (environ 100 km2 de surface) ; les seconds s’en sont servis pour se débarrasser des opposants au régime communiste.

Cet archipel, à l’origine inhabité, situé en mer de Chine (appelée maintenant par les Vietnamiens "Mer de l’Est") à180 km au sud-est du Cap Saint-Jacques a un climat chaud et humide avec une végétation luxuriante et subtropicale. Au début des années 1700, c’était un "Établissement anglais" ; l’Empereur d’Annam "Gia Long" le céda à Louis XVI en 1787 mais "Poulo-Condor" (Pu Lao Kundur, en malais, veut dire "île aux courges") ne fut effectivement occupé par les Français qu’en 1861 (Second Empire). L’idée d’y construire un pénitencier d’où les bagnards n’auraient pas la possibilité de s’échapper s’imposa d’elle-même dans les années 1880. J’en ai eu la preuve, personnellement, car, jeune officier de marine pendant mon service militaire, j’ai participé à l’opération de sauvetage de quelques bagnards fugitifs qui avaient tenté de prendre le large en barque au début du mois de février 1953 et qui eussent été dévorés par les requins si nous n’avions pas été là !

Dans les années 1990, le gouvernement vietnamien décida de transformer l’archipel en lieu touristique et le bagne en musée du souvenir. Idée intéressante : en effet, la baie abritée par un cirque de montagnes est magnifique, les touristes sont attirés par les plages , avec possibilité de plongée sous-marine et par le parc national. Nous y sommes allés, mon épouse et moi, le jour du Nouvel An 2008. Elle, en touriste fort intéressée, et moi en pèlerinage : 55 ans après, les souvenirs étaient encore très proches, en particulier ma colère d’alors devant l’impossibilité où je me trouvais de témoigner mon indignation.

Jean-Michel Rocard
Toulouse le 9 janvier 2008

Quelques informations pratiques :
Comment accède-t-on à Con Dao ? Par un avion (ATR 72 de la Vietnam Airlines, 64 places, 45 mn de vol) depuis Ho Chi Minh Ville qui atterrit à l’aéroport de Con Son. Service minimum (un verre d’eau aux voyageurs classés en deux catégories = les touristes attirés par les plages plus que par l’histoire et les familles vietnamiennes qui viennent pour le devoir de mémoire, comme moi mais pas pour les mêmes raisons !)
A 13 km de l’aéroport, par une route sinueuse (jalonnée encore de bornes Michelin !), dominant la baie et son cirque de montagnes (586 m altitude max) et au loin les autres îlots de l’archipel, se trouve l’hôtel d’Etat "Saïgon Con Dao Resort". Accueil chaleureux, petits pavillons (anciennes maisons coloniales), bonne climatisation, propreté impeccable, bon restaurant, le tout en bordure de mer à côté de la villa du Gouverneur du pénitencier, elle-même transformée en musée du souvenir. À 500 m de là se trouve un hôtel privé à 5 * "Con Dao Resort" avec piscine, plage privée en face du port et bureau de tourisme Ces hôtels ont chacun leur site internet.Jean_Michel_Rocard

- cf. site de Jean-Michel Rocard

- Jean-Michel Rocard : biographie (en langue anglaise)

 

 

photos de Jean-Michel Rocard

 

 

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arrivée en avion

 

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le port qui n’a pas changé depuis 1953

 

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Une grande salle de détention

 

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corvée de nettoyage

 

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Le cimetière des dizaines de milliers de victimes
(dont le seul crime était de vouloir l’indépendance de leur pays !)

 

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liens

- quelques photos tirées du site photos.bidouze.com

IMG_6413

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IMG_5950

 

- aller voir ce site

 

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- Vietnam : retour à Poulo Condor, l'île du bagne

- carte situant l'île de Poulo Condor (Con Son)

ssmapns0

 

 

- retour à l'accueil

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Commentaires
B
Mon oncle qui vient de décéder était engagé dans la marine nationale française comme radio. Son bateau fut stationné à Poulo Condor dans l'immédiat après-guerre et il se souvenait en particulier des japonais qui y étaient alors prisonniers, y compris quelques "gros poissons", officiers ou diplomates, sans doute. L'un d'entre eux l'avait surpris par sa maîtrise de la langue française.<br /> <br /> Pour le reste il allait, disait-il, rarement à terre et se rappelait surtout d'avoir observé les prisonniers employés sur les bateaux de pêche.
Répondre
E
Les actes de ce colloque :<br /> <br /> <br /> <br /> https://www.amazon.fr/Colonisation-r%C3%A9pressions-Chantal-Chanson-Jabeur/dp/2846544328/ref=sr_1_1?ie=UTF8&qid=1509629847&sr=8-1&keywords=colonisations+et+r%C3%A9pressions<br /> <br /> <br /> <br /> contiennent un article sur la prison dans l'Indochine coloniale. <br /> <br /> <br /> <br /> Quelques éléments : 40 000 bagnards en Indochine pendant toute la période coloniale, contre un peu plus de 100 000 en Guyane (même période de temps). Il y avait quelques détenus indochinois en Guyane mais cela ne change pas beaucoup la répartition : la proportion de la population était en gros la même.<br /> <br /> <br /> <br /> Deux tiers des condamnés dans les bagnes indochinois l'étaient pour vol, ce qui laisse la place pour au plus 13 000 détenus politiques (et il y a aussi les meurtriers, etc...). <br /> <br /> <br /> <br /> Les détenus politiques n'étaient pas obligés de travailler. <br /> <br /> <br /> <br /> L'article explique que la principale cause de mortalité était non l'alimentation, suffisante, mais les épidémies liées au manque d'isolement :<br /> <br /> <br /> <br /> « En conséquence, la mortalité, que déplorent tous les rapports de l'inspection générale des colonies, atteint généralement des taux considérables qui avoisinent 3 à 5% par an jusqu'en 1939, avec des pics de 8,8% (1931) mais peut atteindre certaines années jusqu'à 15,7% (1930), chiffres plus que considérables pour une population en majorité jeune ou adulte : ce sont les taux des bagnes des arsenaux de la Marine au XIXe siècle [en métropole : Brest Rochefort Toulon] » <br /> <br /> <br /> <br /> Après 1932, le taux de décès est beaucoup plus bas, dans les 2% selon les années (NB c'est à dire la mortalité qui pourrait être attendue dans une population de pyramide des âges équilibrée ayant 50 ans d'espérance de vie à 20 ans...)<br /> <br /> <br /> <br /> Or, c'est aussi dans les années 1930 qu'il y a le plus grand nombre de détenus politiques, suite aux mouvements du début des années 1930. <br /> <br /> <br /> <br /> Conclusion : méfions nous des romanciers et des adeptes du "devoir de mémoire". <br /> <br /> C'est toujours facile de faire de grandes déclarations pathétiques sur le dos de son propre pays, c'est d'ailleurs le fond de commerce des intellectuels français depuis X temps. Mais l'histoire est plus précise et parfois moins manichéenne.
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D
Je recommande particulièrement les oeuvres passées, présentes ou futures de mon ami Canadien Gaï de Ropraz qui manie avec dextérité et érudition la langue française aussi bien écrite que parlée(cf ses livres par exemple "La Mémoire des Vagues"et "Les larmes d'Ormuz"). J'attends avec impatience la parution de son nouveau thriller.En ce qui concerne Poulo Condor, administré d'abord par les annamites Viets et Chinois, puis par les Français,à lire ce qui précède sur ce bagne-mouroir comme écrit Gaï, ça fait froid dans le dos.Vie la sortie de son bouquin!!Bernard DE MAGNY GARCIA, Officier de l'Armée de l'Air, petit-fils du Colonel Charbonnel, aide-de camp de Gallieni et proche de Lyautey.
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G
Je ne me souviens pas avoir notifié que Poulo Condor (On l’écrivait sans "E") n'avait été édifié que pour les prisonniers politiques. De mon temps (Les dernières années de Saïgon avant sa chute) le fait de prisonniers politiques était notoire. Je crois bien aussi que le Gouverneur de l’île avait également le titre de Directeur du bagne. Une chose est certaine, tout le personnel carcéral vivait sur les îles. Personnellement, j’étais rattaché à la société Denis Frères, responsable de la pêche, et nous connaissions les îles. Il est tout aussi exact que certaines familles des détenus vivaient sur place, et que de nos jours, le terme de "mouroir" n'est pas usurpé. Je termine actuellement un ouvrage qui a le Vietnam des années que j'ai connues pour théâtre. Mais au fil des pages, Poulo Condor n'est qu'un rappel quant à son existence, et renforce simplement la portée dramatique de ce Thriller.<br /> <br /> Gaï de Ropraz (Toronto, ONT Canada)<br /> <br /> www,gaideropraz (Google.fr ou ca)<br /> <br /> Édité par JCL (Montréal, QUE Canada)
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O
Bonjour,<br /> <br /> Je pense que vous avez un peu simplifié l'usage du Bagne aux seuls prisonniers politiques, le Musée, à la sortie de la ville est très intéressant pour se faire une idée, bien plus, à mon sens que la visite des prisons. Bien sûr, beaucoup, beaucoup de morts d'épuisement à Poulo Condore et aussi, beaucoup, beaucoup de "Droit commun" même si l'accent est mis sur les prisonniers communistes dans les mises en scène présentées dans les prisons. Ce qui m'a surpris à Côn Đảo c'est qu'il n'y a rien sur l'administration de la prison, tout est centré sur la vie des prisonniers mais toute l'Ile, n'était qu'une immense prison. Où vivaient les gardiens? Où était l'administration? Quelle était la logistique pour approvisionner le Bagne, si loin des cotes du Vietnam? Le Gouverneur de l'Ile était aussi le Directeur de la Prison, qui vivait sur l'Ile en dehors des gardiens? Le Musée apporte des réponses car bon nombre de documents présentés sont des documents français. On y apprend que, du fait de l'éloignement, les Droits communs pouvaient faire venir leur famille qui vivait alors à l'extérieur de la prison. Qu'il y avait suffisamment de "porosité" entre l'extérieur de la prison et l'intérieur, pour que le Vietminh puisse y réaliser un journal, que des radios étaient introduites (dans la période plus récente) Reste que Poulo Condore, à l'image des autres bagnes était un mouroir où l'on y cassait le caillou...
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  • Ce site édite une revue en ligne qui encourage les savoirs et les recherches consacrées à l’histoire coloniale et post-coloniale, à l'histoire des constructions mémorielles et des immigrations d’origines coloniales
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