Yves Courrière
le décès d'Yves Courrière
journaliste-historien de la guerre d'Algérie
dans les années 1960-1970
Yves Courrière, journaliste, biographe, notamment de Joseph Kessel et Jacques Prévert, écrivain et grand spécialiste de la Guerre d'Algérie est décédé mardi à Paris à l'âge de 76 ans, a annoncé à l'AFP sa fille Caroline.
Grand reporter à la radio à la fin des années 1950, il a notamment travaillé pour Radio Luxembourg, devenue RTL, et animé la première édition des Dossiers de l'Ecran à la télévision.
Yves Courrière, de son nom de naissance, Gérard Bon, avait vu le jour à Paris le 12 octobre 1935.
Au début de sa carrière, il a suivi de nombreux voyages du général de Gaulle en Afrique et couvert des conflits au Moyen-Orient et en Algérie. Ses reportages en Amérique Latine furent récompensés par le Prix Albert-Londres, en 1966.
Il publia La Guerre d'Algérie, quatre tomes édités entre 1968 et 1971, qui firent référence sur ce conflit meurtrier. Il réalise avec Philippe Monnier en 1972 le tout premier documentaire consacré à la guerre d'Algérie.
"Il a donné toute sa vie à l'information, c'était sa ligne de vie", a confié à l'AFP sa fille Caroline.
Plus tôt, couvrant le procès Eichmann à Jerusalem en 1961, Yves Courrière y rencontre Joseph Kessel, qui deviendra son maître à penser en journalisme, selon sa fille unique.
Il en écrivit une épaisse biographie, Sur la piste du lion. Il arrête le journalisme en 1968 pour se consacrer à l'écriture et sortira plusieurs romans et biographies sur des personnalités comme Jacques Prévert, Roger Vailland ou Pierre Lazareff.
Sous le titre Éclats de vie, il avait publié ses mémoires chez Fayard en 2003.
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- les quatre tomes de La guerre d'Algérie d'Yves Courrière
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du prétendu "oubli" de la guerre d'Algérie
Très intéressante nécrologie d'Yves Courrière écrite par l'inévitable Benjamin Stora dans le Monde d'hier 16 mai 2012). Intéressante par ce qu'elle révèle des contradictions de l'idéologie dominante - dont Stora est une incarnation parfaite - relative à l'oubli dont la société française aurait fait preuve à l'égard de son passé colonial et de la la guerre d'Algérie notamment. De ce prétendu oubli, de cette scotomisation (dirait Lacan), fondés sur le refus d'affronter la pourriture coloniale (Birnbaum), Stora et quelques autres ont fait un élément essentiel de leur "oeuvre" afin, bien sûr, de pouvoir se présenter avantageusement en parangons de la mémoire et de l'histoire outragées.
Or que nous dit Stora dans son article ? Eh bien que les quatre volumes sur la guerre d'Algérie, publiés par Courrière à partir de la fin des années soixante (1968 si mes souvenirs de l'article sont bons), ont rencontré un succès éditorial massif à l'époque et que l'enquête du grand reporter, fondée notamment sur des entretiens avec les principaux protagonistes de cette guerre a ouvert la voie aux historiens et qu'en outre en n'occultant rien des turpitudes des uns et des autres, le pauvre Courrière s'était mis à dos à la fois les soldats perdus de l'OAS, dont certains l'avaient menacé de mort, et les nouvelles autorités algériennes, lesquellles lui avaient interdit tout séjour sur leur sol.
Six ans seulement après la fin de la guerre commencait donc à paraître une enquête monumentale en quatre volumes, vendues à des dizaines de milliers d'exemplaires, ce qui paraît contradictoire avec cette thèse sans cesse rabachée de l'oubli et de la dénégation.
Si je fais appel à mes souvenirs d'enfant, il se trouve que je me rappelle très bien des livres de Courrière - je suppose que certains des titres des volumes m'impressionnaient beaucoup tels Le Temps des léopards ou Les Fils de la Toussaint - parce que mes parents et mes grand-parents paternels (pourtant très "Algérie française") les lisaient. Alors ?
Quel oubli, quelle gangrène ? Je me rappelle aussi qu'à la bibliothèque municipale, on pouvait trouver aussi à la même époque les récits de Massu et Bigeard sur la Bataille d'Alger. Je ne l'ai pas oublié non plus parce que, dans ces livres, certaines photographies de massacres et de supplices infligés (égorgements, amputations du nez) aux musulmans par le FLN m'avaient marqué.
J'ai donc l'impression que contrairement à ce que disent la quasi-totalité des historiens bien pensants, les années 1970 ne furent pas, en France, des années d'oubli mais bien au contraire au contraire un temps béni où un débat contradictoire sur la guerre était encore possible et que c'est bel et bien notre époque qui, du fait d'une histoire inféodée au politiquement correct, organise systématiquement l'oubli et le déni (des abominations du FLN notamment).
Récemment, chez un bouquiniste parisien, j'ai trouvé par hasard le témoignage passionnant du Bachaga Boualem (céki ce mec ?), ancien vice-président de l'Assemblée nationale, et partisan de l'Algérie française, publié aux éditions France-Empire à la fin des années 1960.
J'ai commencé à le lire et l'on y trouve une relation honnête des turpitudes coloniales de la France. Mais ce qui est insupportable pour les idéologues de notre temps, et c'est pourquoi ce livre ne sera jamais réédité, c'est que ces mémoires rendent grâce aussi aux aspects positifs de la colonisation et témoignent d'un attachement inféfectible à la France (je crois même qu' un des fils du Bachaga a épousé la fille d'un des chefs de l'OAS). Tout cela aujourd'hui est oublié, tû, par ceux-la même qui ne cessent de gémir sur le prétendu déni français.
Eh bien non Messieurs, les années 1970 furent un âge d'or en ceci qu'elle permettaient encore une libre expression des différents récits (songeons au débat télévisé incroyable, à l'aune de l'hystérie post-coloniale qui règne aujourd'hui, entre le colonel Trinquier et Saadi à une heure de grande écoute). Rendez-nous France Empire !
Le site du parti de l'In-nocence
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