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études-coloniales
5 juin 2007

33e congrès de la French Colonial Historical Society

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33e congrès

de la

French Colonial Historical Society

La Rochelle, 6-10 juin 2007


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- Programme de la conférence


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3 juin 2007

Corps et société en Guadeloupe (Harry Mephon)

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Corps et société en Guadeloupe

un livre de Harry MEPHON

 

- Corps et société en Guadeloupe, Harry Mephon, éd. Presses universitaires de Rennes, mars 2007.

 

Présentation de l'éditeur

De manière générale, les catégories pour penser les pratiques corporelles et sportives invitent à la perception d'un univers consensuel qui échappe aux aléas du monde social ordinaire. Ce livre opère une rupture, tout d'abord en fondant rigoureusement les rapports des activités corporelles avec les autres pratiques économiques, politiques et culturelles, ensuite en les enracinant dans une histoire de longue durée.
Ainsi, il ne s'agit plus de situer le fait sportif dans l'histoire supposée connue de la Guadeloupe mais de la repenser dans sa globalité à travers le prisme des pratiques corporelles. Le fait de privilégier le corps comme entrée pour étudier les rapports sociaux éclaire l'histoire d'une société d'abord soumise avec l'esclavagisme aux pires formes d'asservissements corporels.
L'étude des formes d'une culture incorporée permet de comprendre les rapports de domination mais aussi les résistances et les révoltes qu'ils suscitent. La genèse des pratiques sportives fonde les liens entre trois espaces de réalité historiquement constitués par celui de la culture somatique et respectivement par ceux du sport de masse et du sport de haut-niveau.
Par un retournement de sens, le corps outil de domination devient par l'excellence des champions guadeloupéens le moyen le plus visible d'une affirmation identitaire confrontée aux rapports de force établis par la métropole.

Biographie de l'auteur

mephon_harry Harry P. Mephon est docteur en Sociologie et professeur certifié d'Education physique. Ancien athlète de haut niveau, il est entraîneur d'athlétisme, prépare et entraîne un grand nombre de sportifs de haut niveau. Il intervient au SUAPS de l'université Antilles-Guyane.

 

 

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- Presses universitaires de Rennes : commander le livre

 

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Guadeloupe, Saint-Claude, allée du stade Ducharnoy

 

article de Harry Mephon

- "Le premier sélectionné olympique guadeloupéen : Maurice Carlton", Bulletin de la Société d'histoire de la Guadeloupe (Bull. Soc. hist. Guadeloupe), 2000, no124-25, pp. 13-19.

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Maurice Carlton (né en 1913),
sélectionné aux Jeux Olympiques de 1936 à Berlin

- Maurice Carlton

L'aventure olympique des sportifs guadeloupéens ne commence pas avec les champions récents. Alors que les sportifs guadeloupéens d'avant-guerre sont tombés dans l'oubli, même dans la mémoire insulaire, l'auteur tente de présenter l'élite sportive guadeloupéenne dans le contexte des revendications des années trente. Après une brève introduction sur la constitution et la transformation du champ sportif guadeloupéen, il décrit l'attitude de la France coloniale dans le contexte de la légitimation sportive des Noirs des années trente. Si les exploits de Maurice Carlton ouvrent la voie de la reconnaissance d'un capital sportif au niveau olympique, ce capital se vit à l'époque sans aucune volonté institutionnelle de le rentabiliser.

source

 

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Société des artistes antillais. 1er salon 1924.
Pointe-à-Pitre du 15 au 31 janvier ; auteur : Casse Germaine, 1924

(source, Caom)



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2 juin 2007

Du bon usage politique du passé colonial (Gilbert Meynier)

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Du bon usage politique du passé colonial

Gilbert MEYNIER

 

La mémoire commune de l’histoire de l’immigration en France ne sait plus guère aujourd’hui que l’implantation des Italiens en France fut douloureuse, et parfois sanglante, à Marseille en 1881, à Aigues Mortes en 1893, à Lyon en 1894… Mais les vexations et le racisme dont les Italiens avaient été victimes en France se prolongèrent plus tardivement pour les Algériens : le différend franco-algérien s’exacerba, devant les blocages coloniaux, jusqu’à l’insurrection de novembre 1954. La mémoire des Algériens et des originaires d’Algérie en France est plus à vif du fait de la discrimination coloniale érigée en système, de la cruauté et des traumatismes de la guerre de 1954-1962 – et la conquête, au XIXe siècle, avait été plus sanglante encore ; sans compter les répressions sanglantes de multiples insurrections ; sans compter, pour les Algériens immigrés, les massacres d’octobre 1961 à Paris. Les blessures du passé sont à vif, et sans commune mesure avec celles de la mémoire souffrante des Français d’origine italienne.

Mais aussi, l’intégration des Italiens en France s’était produite au temps du capitalisme moderne – de 1870 à 1960. Alors que, pour les Maghrébins, le processus décisif en fut engagé au  dernier tiers du XXe siècle : à un moment où commença à triompher, le capitalisme post-moderne . On gagne maintenant de plus en plus d’argent, non pas selon les rigoureuses procédures du capitalisme industriel telles qu’Adam Smith, puis Max Weber, les avaient énoncées et analysées, mais par la spéculation financière, par les transferts de capitaux, par la constitution de rentes et de statuts : un «artiste», français, suisse ou belge, gagne aujourd’hui bien plus qu’il y a seulement vingt ans ; il est admis que tels intellectuels médiatiques fassent payer leurs conférences, jusqu’à des associatifs bénévoles qui les invitent.

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Ainsi va l’orchestration des divers «communautarismes» : Tarik Ramadan est à l’islam ce que Bernard-Henri Lévy est à la philosophie : deux vedettes, produits et acteurs d’un système rentier. Et que dire de la ritournelle du «choc des civilisations», qui oppose «l’Islam» et «l’Occident» comme des essences opposées, et qui est le bien commun des frères ennemis Bush et Ben Laden. Les stock-options et les parachutes dorés se sont banalisés.
À l’autre bout de la chaîne sociale, à leur niveau, en France, les bénéficiaires des régimes spéciaux de retraite tentent de leur côté de préserver leurs petits – et transitoires – privilèges. Emmanuel Todd a comparé les actuels États-Unis avec l’Empire romain finissant : produisant de moins en moins en son centre, prospérant en vivant sur l’empire , conçu comme machine rentière. La dégénérescence du vieux capitalisme productif a entraîné depuis quelques lustres la précarisation du travail, le délitement des solidarités nationales – école, sécurité sociale…–  qui, il y a peu, structuraient l’intégration.

Les répliques à cette évolution furent souvent des réactions catégorielles et de repli statutaire, des protestations enserrées par des réactions partielles et locales – je dirais localistes : nationalistes, soviet_anthem_postercommunautaires, crispées sur des acquis, mais sans conception globale de ce qui les détruit –, ne prenant pas la mesure des formidables mutations mondiales. Aujourd’hui seuls les capitalistes néo-modernes gardent une vision universaliste. On ne chante plus L’Internationale au parti socialiste, mais La Marseillaise.

La classe ouvrière est en voie de disparition. Avec elle s’étiolent les banlieues rouges du PC : Marie-George Buffet a fait 1,93 % des voix aux présidentielles. Dans sa campagne, elle n’a pas une seule fois prononcé le mot, obscène, de «capitalisme», médiatiquement affadi en «libéralisme» politiquement correct, cela au prix d’un contresens manifeste : le capitalisme n’a jamais été aussi peu libéral qu’il l’est aujourd’hui, écrasé qu’il est sous le poids de quelques sociétés à objectifs principalement financiers, et non proprement économiques au sens productif du terme. Nous vivons de ce point de vue la fin de la modernité. Presque aucun(e) candidat(e) n’a mentionné les questions qui poignent le monde, à son échelle, précisément, mondiale. On en est resté au localisme-refuge à accents nationaux, au ministère de l’identité nationale…, cela au moment où le national se délite et requiert une refondation en phase avec l’actualité – chez nous elle s’appelle l’Europe.

Mais le fait que, le 20 janvier 2000, le principe d’une taxation des flux financiers inspirée par la taxe Tobin (un prélèvement de 0,5% sur les transferts de capitaux) ait été refusé à six voix près (229/223 voix) par le Parlement européen est passé inaperçu : Les députés de la liste Lutte Ouvrière – Ligue Communiste Révolutionnaire avaient voté contre – Alain Krivine s’était abstenu. Si à eux cinq ils avaient voté pour, le résultat du vote aurait été inversé. Arlette Laguiller, il est vrai, avait raconté que le capitalisme, cela ne se réforme pas, cela se détruit.

 

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Saïgon, 1946. Pousse-pousse rue Catinat (source)

 

Pour en revenir au passé colonial, il a bel et bien laissé des traces sur les discriminations actuelles. Mais ces dernières sont aujourd’hui prorogées par des duretés qui appartiennent bien au présent, quand bien même des rebonds de mémoire peuvent les relier au passé. Aujourd’hui, la fixation sur le passé ne constitue-t-elle pas un dérivatif ? Le système prévalent n’est plus colonial, il n’est plus national. Il creuse dramatiquement les écarts entre sociétés développées et sociétés sous-développées, et entre les humains de ces sociétés respectives. Ce système post-moderne nourrit les idéologies de statut (par exemple «communautaristes») et leur donne forme politique. Lui est-il indifférent que la source de tous les maux ait tendance à rester ancrée dans le passé – colonial en l’occurrence ? Les hérauts des victimes tendent à faire d’un réel passé traumatique l’antécédent obligé et l’explication unique des angoisses et des traumatismes du présent. Il n’y a pas que les islamistes qui soient, ainsi que le pense le philosophe égyptien Fouad Zakariya, «aliénés par le passé».

Dans l’histoire des sociétés, comme dans celle des individus, existent des mémoires-écrans derrière lesquelles tendent à être refoulés les strates du substrat antérieur de leur passé, occultées qu’elles sont par des mémoires plus récentes , et aussi parce qu’elles sont construites par des pouvoirs ou/et des groupes de mémoire (Pieds-Noirs, descendants d’esclaves, Indigènes de la République). Ce processus d’occultation existe aussi pour la perception du présent : on est trop démuni d’outils de compréhension pour en percevoir les duretés spécifiques. On les explique donc par des effets de vitesse acquise. Le mal-être du présent est ainsi idéologisé en fixation sur un temps révolu. Dans l’Algérie d’aujourd’hui, il y a aussi un mal-être qui est expliqué en référence au passé : par les islamistes, par la masse du peuple lui-même, par le pouvoir…

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© Christophe Herrmann, L'Africain (source)

En France de nos jours, se jouent des ping-pong mémoriels où les hérauts intéressés du capitalisme post-moderne mondial comptent les points, voire attisent le feu : est-il même certain que Sarkozy soit un colonialiste impénitent ? Il l’est peut-être, mais est-ce si important ? Ou ne brode-t-il pas sur un thème sensible qui bloque la réflexion ? Et les «racailles» et les «kärcher» n’auraient-ils pas été une construction politique délibérée ? De ce point de vue, les Indigènes de la République et leurs compagnons de route de l’anticolonialisme post bellum, quelque fondés qu’ils soient dans leurs dénonciations, saisissent-ils que leur fixation sur le colonial n’est pas forcément pour déplaire à des responsables politiques qui n’ont pas vraiment envie que l’on parle d’autre chose ? En tout cas pas qu’on analyse le système du capitalisme post-moderne dont une personnalité comme Sarkozy est le génial représentant : il a su entourer sa campagne électorale de formules nationalistes à même de s’attacher des électeurs désorientés et rassurés par le retour à un tel localisme. Ce faisant, il s’est appuyé sur ce que Gramsci appelait un «senso comune», un dérivatif idéologique dans lequel s’engouffrent les dénonciateurs exclusifs d’un présent/passé colonisé, intemporel et, comme la mer de Valéry, toujours recommencé.

Gilbert Meynier
Professeur émérite à l’Université de Nancy II,
CIMADE Lyon
texte à paraître prochainement dans l'hebdomadaire Réforme

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1 juin 2007

la colonisation française en Afrique noire : aspects économiques et sociaux (Marc Michel, 1985)

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Bobo-Dioulasso. Les indigènes voyagent dans le train,
Haute-Vota (1930/1960)


la colonisation française

en Afrique noire :

aspects économiques et sociaux

Marc MICHEL (1985)

 

"Le mouvement colonial français représente le stade suprême, non du capitalisme français, mais du nationalisme français", ont pu écrire Christopher Andrew et Sydney Kanya-Forstner dans un raccourci provocant et iconoclaste (1). Les travaux les plus récents sur l'Empire colonial français dans son ensemble paraissent leur donner largement raison (2). A fortiori en ce qui concerne l'Afrique noire française dont l'importance, l'utilité et la rentabilité économiques ne se sont révélées que tardivement dans ses relations avec la métropole et avec le monde.

D'ailleurs, longtemps confinée dans l'offre de ses hommes, l'Afrique noire n'acquit nullement une position de force lorsqu'elle remplaça, au XIXe siècle, les hommes par des produits qui, après tout, ne jouèrent qu'un rôle marginal dans la Révolution industrielle, pas plus que ses marchés, supposés extraordinaires, ne constituèrent des débouchés réellement décisifs. L'Afrique noire, comme le Tiers-Monde dont elle est tout de même une composante géographique essentielle, ne serait pas sortie de cette situation avant le début des années 1950 (3).

Les possessions françaises qui y étaient peu peuplées et peu favorisées malgré leur gigantisme ne pouvaient échapper à ces conditions générales, même si elles nouèrent progressivement des liens privilégiés maintenus au-delà des indépendances.

 

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Manoka. Société Nationale Camerounaise (SNC). Locomoteur
à moteur diesel sur voie de 0,60 m.
Exploitation forestière.
(1919/1945)
source : base Ulysse, Caom

 

Aussi, doit-on remarquer l'extraordinaire continuité du discours officiel de la colonisation à la décolonisation, de la "mise en valeur" au "développement", de Leroy-Beaulieu en 1891 à Albert Sarraut [photo] enAlbert_Sarraut 1923 et à René Pleven en 1944 (4). C'est la litanie du "non-développement" auquel il faudrait remédier par un effort de bonne volonté de la métropole, l'engagement de ses capitalistes et l'initiative de l'État. Très longtemps les réalités correspondirent au constat d'échec. En 1914, même si l'Empire était bien devenu le troisième partenaire commercial de la France, les colonies d'Afrique noire, elles, n'étaient pas sorties de "l'âge du comptoir", et plus de trente ans après les débuts de la "course au clocher", elles n'occupaient encore qu'une place dérisoire dans les échanges et les investissements de la métropole (5). Il ne faut donc pas s'étonner de la faiblesse, voire de l'inexistence des réalisations (ports, chemins de fer, pistes...) à la veille de la Première Guerre mondiale. Les années 1920 furent, certes, marquées par un élan de l'effort public des gouvernements locaux (puisque la métropole s'était dérobée) et de l'action privée. Fut-il brisé ou "remodelé" par la Crise (6) ?

Celle-ci eut, en effet, des conséquences à longue portée ; elle relança l'initiative de l'État métropolitain, réorienta les investissements et souda économiquement, monétairement les colonies françaises d'Afrique noire à la métropole en vue de l'établissement de ce que Sarraut appela "l'autarchie" (7). En ce sens, la crise préluda aux grandes mesures de l'après Seconde Guerre mondiale qui tendirent tout à la fois à renforcer le "bloc franco-africain" dans l'Union française et à associer les "territoires" d'Afrique et de Madagascar à une Europe reconstruite, où la France serait ainsi affermie. Dans ces conditions, la décolonisation acceptée et négociée à la fin des années 1950 fut assortie d'une véritable politique compensatoire destinée à garantir l'intégration de l'Afrique francophone dans le monde occidental (8).

 

"mission civilisatrice" et "coopération"

Un autre leit-motiv du discours officiel fut celui de l'Homme, celui de la "mission civilisatrice de la France", du "progrès" à la "coopération", là aussi un langage décelable depuis Leroy-Beaulieu jusqu'à Sarraut et de Sarraut au général De Gaulle à Brazzaville et à Georges pompidou définissant les principes de la "coopération" en 1964 (9). Que de bonnes intentions ! Et que de lenteurs, dira-t-on, dans les réalisations si l'on en juge par l'état de l'enseignement en 1919 (10) ou de la santé en 1939 (11).

Profitant de l'acquis, tout de même considérable, et d'une évolution qui fut peut-être moins affectée par la guerre qu'on ne serait porté à le croire, aiguillonnés par l'extérieur, sincèrement persuadés de la nécessité de changer les choses et convaincus de l'avenir de "l'association", les responsables d'après 1945 entraînèrent la France dans l'effort qu'elle n'avait pas effectuée jusque-là. Cela n'alla pas sans mal car beaucoup partagèrent vite la conviction qu'il valait mieux choisir "la Corrèze que le Zambèze", parodiant ainsi la retentissante prise de position de Raymond Cartier en 1956. En tout cas, les responsables métropolitains firent alors de l'Afrique noire francophone le lieu privilégié de l'aide au développement et les réalisations progressèrent effectivement à un rythme particulièrement accéléré dans les années 1950. On ne peut que remarquer que cet ultime effort "colonial" se fit en pleine décolonisation.

Au cœur de cette transformation du tissu social se posait la question fondamentale des fins dernières de la colonisation française en Afrique noire. On peut se demander, à cet égard, à partir de quand et comment elle s'était posée clairement. "La suzeraineté européenne ne devra pas être temporaire dans la majeure partie de l'Afrique" et "toutes les colonies ne sont pas destinées à s'émanciper", croyait Leroy-Beaulieu en 1891. Avait-on changé d'avis après la première Guerre mondiale ? Révéler l'indigène à lui-même, "c'est là une fin véritable de notre venue en ces pays", affirmait le gouverneur général Carde en 1930. Ce fut aussi le langage de Brazzaville en 1944 : acheminer les populations africaines vers l'accomplissement de leur "personnalité propre". En réalité, le discours officiel français à l'égard de l'Afrique noire fut une variation continuelle sur les thèmes de l'assimilation et de l'association qui masqua jusqu'au bout un esprit d'intégration que René Pleven reconnaissant à Brazzaville en soulignant que la préoccupation constante de cette conférence était "l'incorporation des masses indigènes dans le monde français".

 

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30 janvier 1944, discours de De Gaulle à Brazzaville ;
à gauche, René Pleven

Cette attitude qui imbriquait les dimensions du culturel et du politique, dut, par la force des choses, se modifier avec les indépendances. Mais, fondamentalement, elle continua à inspirer la conception officielle des relations avec les pays où s'était forgé "cet art de vivre ensemble, qu'ont créé, au cours d'une histoire qui ne fut pas sans difficultés, les Africains et les Malgaches d'une part, les Français de l'autre" (13).

Alors bien sûr, on se demande quelle fut la réponse africaine à cette solliciation continuelle. Il y eut naturellement un premier temps de résistances, résistances à l'agression physique de la conquête, résistances à l'agression sociale de l'installation de l'État colonial. Mais, elles eurent aussi, naturellement, leur correspondance dans une collaboration dont les dimensions et la signification socio-culturelle furent peut-être plus importantes encore pour l'avenir (14). Cette collaboration, dans sa phase assimilationniste, culmina dans doute avec Blaise Diagne (15). À son tour, elle suscita des rejets d'abord intellectuels puis politiques et enfin parfois passionnels mais ces rejets n'ont pas gommé l'imprégnation socio-culturelle - le problème de l'héritage colonial étant, finalement, la mesure entre le rejet et l'adhésion.

Marc Michel, professeur à l'université en Provence
in L'Afrique noire depuis la conférence de Berlin,
publications du Cheam (diff. Documentation française), 1985, p. 121-124.

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- source de la photo-titre : base Ulysse, Caom

_______________________________

(1) Andrew C. et Kanya-Forstner S., "The french Colonial Movement during the Third Republic. The unofficial mind of imperialism, Transactions of the Royal Historical Society, 5th series, vol. 26, 1976, p. 148.
(2) Marseille Jacques, Empire colonial et capitalisme français. Histoire d'un divorce, A. Michel, 1984.
(3) Bairoch Paul, "Le bilan économique du colonialisme, mythes et réalités", in Histoire et sous-développement, éd. par Leiden Center for the History of European Expansion et la Maison des Sciences de l'Homme, Paris, 1980, p. 35-39.
(4) Leroy-Beaulieu Paul, De la colonisation chez les peuples modernes, 3e éd. 1891 ; Sarraut Albert, La mise en valeur des colonies françaises, 1923 ; Discours de René Pleven à l'ouverture de la Conférence Africaine de Brazzaville, le 30 janvier 1944.
(5) Michel Marc, L'Appel à l'Afrique, contributions et réactions à l'effort de guerre en A.O.F. 1914-1918, Publications de la Sorbonne, 1982 ; et Coquery Catherine, "L'économie coloniale en Afrique noire : le financement et la “mise en valeur“, 1900-1940. Méthodes et premiers résultats", in Eighth International Economic Congress, Budapest, 1982, republié dans les Études africaines offertes à Henri Brunschwig, École des Hautes Études en Sciences Sociales, 1982.
(6) L'Afrique et la crise de 1930 (1924-1938), colloque de l'université Paris VII publié par la Revue française d'Histoire d'Outre-Mer, n° 232-233, 3e et 4e trim., 1976.
(7) Marseille J., op. cit., p. 187 et sq ; et Poquin J.-J., Les relations économiques extérieures des pays d'Afrique noire de l'Union française (1925-1955), A. Colin, 1957.
(8) Michel Marc, "La coopération intercoloniale en Afrique noire, 1942-1950 : un néo-colonialisme éclairé ?" in Relations Internationales, n° 34, été 1983, p. 155-171.
(9) Discours sur la coopération prononcé par Georges pompidou, Premier ministre, devant l'Assemblée nationale, 10 juin 1964.
(10) Bouche Denise, L'enseignement dans les territoires française de l'Afrique occcidentale. Mission civilisatrice ou formation d'une élite ? Thèse d'État, Paris, 1974.
(11) Domergue-Cloarec Danielle, La santé en Côte d'Ivoire, 1900-1962. Mythes et réalités, thèse d'État, Poitiers, 1984.
(12) Articles de Raymond Cartier dans Paris-Match en août et septembre 1956. Sur l'opinion, voir Ageron Ch.-Robert, "L'opinion publique face aux problèmes de l'Union française", communication au colloque sur les Prodromes de la décolonisation de l'empire français (1936-1952), 4-5 octobre 1984, Institut d'Histoire du Temps Présent.
(13) Les accords de coopération entre la France et les États africains et malgache d'expression française, La Documentation française, 1964, préface de Jacques Foccart.
(14) Sur les problèmes des "résistances" et des "collaborations", voir en particulier les Études Africaines offertes à Henri Brunschwig, op. cit., 5e partie (articles de Jean Suret-Canale, Chhristophe Wondji et Charles Owana sur l'Afrique francophone) et surtout Brunschwig Henri, Noirs et Blancs dans l'Afrique noire française, Flammarion, Nouvelle bibliothèque scientifique, 1983.
(15) Sur Diagne et les "évolués" assimilationnistes, voir Johnson W.-R., The emergence of Black Politics in Senegal, The Struggle for Power in the Four Communes (1900-1920), Stanford, 1971 ; et Crowder Michael, Senegal, A study in French Assimilation, Methuen, 1967. Sur l'A.E.F., Mbokolo Elikia, "Forces sociales et idéologies dans la décolonisation de l'A.E.F.", in Journal of Africain History, 22 (1981), p. 393-407.

Sur les suites politiques, Benoist Joseph-Roger (de), L'Afrique Occidentale Française de 1944 à 1960, Les Nouvelles Éditions Africaines, 1982.

 

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Boutilimit (Mauritanie), la visite au dispensaire (1930/1960) - source : Caom

 

 

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