des professeurs d'histoire parlent
Ferry et Clemenceau (en 1893), le cargo Chandernagor affrêté
par l'État pour le transport de militaires lors de l'expédition de Madagascar en 1885
des professeurs d'histoire
parlent du sujet de Bac sur la colonisation
merci de vos précisions
Je suis en train de corriger le bac et je vous remercie de toutes vos précisions. C'est très utile pour nous professeurs, vos collègues, pour appréhender le sujet.
Hélas, j'en suis à une vingtaine de copies et force m'est de constater qu'effectivement les élèves se contentent de paraphrase... J'avais étudié ce texte en classe avec mes élèves cette année et je l'avais opposé au discours complet de Ferry, du même mois. Je ne corrige pas mes élèves bien sûr, mais j'ai comme dans l'idée que, même en l'ayant étudié, les réponses ont été orientées par les questions et que la réflexion personnelle ne peut être très construite. Ainsi, toutes mes copies se ressemblent, vaste paraphrase entre un clémenceau humaniste et un ferry colonialiste et raciste.
J'essaie donc de prendre du recul, de me contenter de noter "le bac"... mais c'est assez frustrant de demander si peu aux élèves de Terminale et c'est assez douloureux de constater qu'en effet la rigueur historique n'a pas été des plus solides dans le choix du questionnement (on aurait pu justement se servir du propos de Clemenceau pour faire comprendre qu'il parlait au nom de quelqu'un d'autre et qu'il pouvait être subjectif... Hélas la 4eme question adopte clairement et purement un point de vue manichéen... avec toutes les conséquences mémoriales que cela aura pour nos élèves qui retiendront ce texte référence)
cordialement
Christophe, prof au lycée Chrestien de Troyes (à Troyes)
Cela fausse, de toute évidence, le sens des documents
Très intéressant. Les coupes et les déformations de texte sont classique pour le bac, c'est d'ailleurs installé depuis très longtemps. Cela fausse, de toute évidence, le sens des documents.
Je ne sais pas quelle audience les diverses remarques épinglées de ci et de là peuvent avoir sur la rédaction des épreuves mais je continue à croire qu'il serait bon que cette démarche soit amplifiée.
Voulez-vous simplement en rester là ou essayer de porter un peu plus haut ces remarques ? Il faudrait d'abord voir si de tels errements se retrouvent dans les autres disciplines.
Cordialement.
Hugues Vessemont
Lycée Montesquieu Herblay
(auteur de L'histoire au bac pour les nuls, ouvrage sérieux malgré tout....)
Pour revenir sur vos critiques
Bonjour monsieur,
Merci de votre analyse du document dont j'approuve entièrement le fond.
Je suis l'auteur de la correction que vous avez reprise, et j'approuve vos deux premières critiques. Je viens d'écrire un billet sur mon blog pour reprendre votre analyse, revenir sur les deux erreurs et nuancer la troisième.
Je vous sais gré d'avoir corrigé votre première version à la suite de l'intervention de M. Augris.
Une question seulement : pourquoi n'avoir repris et critiqué que ma seule correction alors que bien d'autres circulent sur le net ?
À bientôt
Hugo Billard
professeur d'histoire-géographie au lycée Coubertin de Meaux
http://lewebpedagogique.com/histoire
Cassagnac n'était pas monarchiste…
…mais comme toute sa famille, un bonapartiste constant… et bien connu. Merci à Michel Renard de faire la rectification nécessaire.
Bien cordialement
Posté par Boutan, samedi 23 juin 2007 à 20:23
Cassagnac était bonapartiste...
... bien sûr, le fait est aisément vérifiable. Ce que je n'avais pas fait, me fiant sans plus de précaution à la note relative à ce personnage figurant dans le livre de Gilles Manceron, 1885. Le tournant colonial de la République (La Découverte, 2007, p. 51).
Merci pour votre lecture attentive. J'ai rectifié.
Bien cordialement aussi.
Michel Renard
Posté par Michel Renard, samedi 23 juin 2007 à 23:43
ceci dépasse le BAC
Je suis enseignante d'histoire et je crois enseigner une matière qui doit permettre à tout un chacun de mettre les faits et les evenements en perspective. Ceci devient de plus en plus difficile vule quotat horaire d'une part et d'autre part notre discipline n'est plus considérée comme un élément fondamental pour former "l'honnête homme" mais comme un des éléments qui doit servir à avoir le Bac, une marchandise à consommer !
Par ailleurs depuis quelques années le fait colonial revient en force et pas toujours pour une amélioration de sa perception mais utiliser à des fins de bourrage de crâne parla droite qui nous gouverne et cela ne va pas s'améliorer - je laisse chacun deviner pourquoi -
vos remarques me rassurent MERCI A VOUS
Bientôt tous commissaires politiques ?
Je crois que les commentaires précédents (Le site noir et Cosmète - prof (?) qui écrit avec beaucoup de fautes et qui se trompe totalement sur le problème traité ici) illustrent très bien le manichéisme qui règne sur le sujet. Le site noir croit que resituer les discours dans leur contexte (en tenant compte de l'évolution sémantique) pour comprendre les raisons qui ont motivé Ferry dans sa politique coloniale revient à cautionner le colonialisme (etc, etc...)!!
J'ai fini mon paquet de copies et j'ai heureusement eu le plaisir de lire quelques candidats qui remarquaient que les propos de Ferry étaient rapportés par Clemenceau qui pouvait les déformer... J'ai bien entendu valorisé ces remarques, mais les consignes de correction ne m'ont pas expressément invité à le faire !
Je suis d'ailleurs "tombé" sur votre blog en cherchant les discours originaux, tant il me semblait curieux que Ferry ait pu prononcer que "(sa) politique, c'était la guerre!", paroles que je voyais nettement mieux émaner de la bouche du Père-la-Victoire.
Merci, en tout cas, d'avoir éclairé ma lanterne, avec beaucoup de connaissances et de rigueur.
PS : avec ce sujet, l'EN fait d'une pierre deux coups (accélérer la transformation de l'enseignement de l'Histoire en "éducation politique" pseudo-citoyenne et... donner des points aux candidats !! De la paraphrase et de l'indignation faussement argumentée : il fallait être vraiment très faible pour ne pas récolter 4 points sur 8...)
quelques remarques d'un correcteur
Professeur en lycée je découvre avec intérêt votre site et me permets quatre remarques.
1) Je viens d'achever la correction de mes 98 copies (moyenne 9,18). Un tiers a pris le document en question et les notes ne sont pas brillantes (moins de 3 sur 8). J'avance 2 explications : - des réponses difficiles à évaluer (peu de référence précises; beaucoup de paraphrases) - les élèves qui ont pris ce doc ont généralement pris l'étude de doc qui inspire aussi les candidats limités en connaissances. Aussi suis-je amené à penser que les élèves les plus sérieux ont préféré le doc Plan Marshall pour lequel les connaissances à mobiliser étaient plus faciles à repérer.
Cependant, mises à part quelques "perles" rares (2 copies)sur le racisme de Ferry, les candidats ont respecté les consignes de prudence dans leurs jugements données par leurs professeurs
2) Je ne peux que constater et comprendre la faiblesse de la contextualisation économique et politique dans les réponses. La colonisation est programmée en Terminale S pour expliquer la logique de la décolonisation, dans un temps chronologique qui, pour le reste des thèmes, ne concerne que l'après 1945. Aussi, nous ne pouvons, dans l'heure consacrée "aux temps des conquêtes coloniales" qu'évoquer les passerelles avec les chapitres sur l'âge industriel et l'affirmation de la IIIe République étudiés.... l'année précédente, en première ! Il est regrettable que le processus de colonisation ne soit pas analysé dans son complexe contexte et soit ainsi programmée en TS, privilégiant, de fait, une vision "déterministe" de l'histoire. Le programme de Première L/ES est, quant à lui, mieux construit : la colonisation est intégrée dans l'âge industriel.
3) Achevant une thèse en histoire économique, je suis assez étonné que les facteurs économiques soient minorés par les historiens de la colonisation dans les années 1880-1885. Les pays d'Europe n'attendent pas 1892 pour se livrer à une véritable "guerre des tarifs" pour reprendre une expression de l'époque (Molinari Journal des débats, juillet 1885). La France, encore 2e puissance exportatrice en 1882 (au moins 20% de notre production industrielle était exportée d'après P. Verley), voit se fermer nombre de marchés depuis 1873, tandis que le climat social se dégrade en France dès la fin de 1883 ; la recherche de débouchés "coloniaux" pouvait donc apparaître logique à des gouvernements qui se sont appuyés sur l'économie pour faire accepter la République (Plan Freycinet entre autres). Une solution commerciale jugée d'ailleurs simpliste qui enflamma la polémique (voir Yves GUYOT, Lettres sur la politique coloniale, 1885). La question des débouchés dans le débat colonial semble donc avoir toute sa place en 1885.
[sur ce sujet : protectionnisme et expansion coloniale]
4) À noter enfin que la violence verbale et caricaturale de Clemenceau à l'égard de Ferry peut aussi se comprendre à l'aune d'une campagne électorale pour les élections législatives (octobre 1885). Nous avons vu récemment que ce genre de débats pouvait être outrageant. Et pour se faire une idée des réelles convictions anticolonialistes de Clemenceau, il serait intéressant de connaître le bilan ou les positions de sa politique coloniale lorsqu'il dirige la France de 1906 à 1909. Avez-vous des références à ce sujet?
Merci en tout cas pour la haute qualité de votre site.
Benoît NOËL
Lycée HQE (Léonard de Vinci), Calais
- quelle histoire coloniale au Bac ? (13 juin 2007)